(22.03.2017) En renonçant au labour classique pour effectuer une « rompue », on contribue à maintenir le plus longtemps possible l’effet bénéfique de la prairie sur la structure du sol. Cela est particulièrement important sur sols dégradés, appauvris en humus, sensibles à l’érosion et au tassement.
De plus en plus d’agriculteurs bio se lancent dans cette technique. L’arrivée sur le marché de déchaumeuses et d’autres machines très performantes y contribue. Ces nouvelles machines permettent en particulier un réglage très précis de la profondeur de travail.
Résultats d’essais
De 2014 à 2016, quatre essais pratiques ont été conduits par le FiBL avec des agriculteurs. La rompue fut effectuée sans retournement (= par déchaumages), avec retournement (= avec une charrue déchaumeuse), ou par combinaison des deux méthodes ; tout cela à une profondeur maximale de 10 cm. En plus, il y eut sur une bande-témoin avec un labour classique à environ 20 cm. Puis du blé d’automne fut semé. Les conditions de mise en place furent très différentes d’un site et d’une année à l’autre (voir tableau).
Essai n° | 1 | 2 | 3 | 4 |
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Année | 2014 | 2015 | 2015 | 2016 |
Lieu | Bournens VD | Vufflens-la-Ville VD | Vouvry VS | Vouvry VS |
Type de sol | Mi-lourd | Mi-lourd | Léger | Léger |
Etat du sol lors de la mise en place de l’essai | Très humide | Humide | Normal | Normal à sec |
Rendements du blé d’automne dt/ha | ||||
Labour 20 cm | 36.0 | 33.4 | 55.0 | 45.5 |
Labour 10 cm | 39.2 | 32.3 | 54.8 | 40.7 |
Déchaumages 0 à 10 cm, puis labour 10 cm | 30.8 | 57.1 | 43.7 |
Dans ces essais, les résultats du travail réduit à 10 cm furent parfaitement satisfaisants, en comparaison du labour à 20 cm, car les agriculteurs concernés ont su utiliser les bonnes machines et techniques au bon moment :
- Rendement du blé égal ou très faiblement inférieur
- Nombre de passages de machines : égal ou faiblement supérieur
- Pas davantage d’adventices ou de repousses de prairies
- Concernant les repousses de prairies, deux remarques s’imposent: a) en travail superficiel sans retournement, il peut rester en surface des mottes de prairie, qui dessècheront très bien si la météo est au beau fixe; b) si on travaille avec une charrue déchaumeuse, quelques racines de luzerne retournées à l’envers peuvent parfois repousser et rester dans le blé jusqu’à la moisson. D’habitude, ces racines exposées au froid de l’hiver gèlent, deviennent friables et sont éliminées par la herse-étrille au printemps.
Recommandations pour la pratique
- Si le temps est sec à très sec, les charrues réglées pour travailler à 10 cm rentrent mal dans le sol. On travaille donc uniquement par déchaumages successifs. Commencer 1 à 3 semaines avant le semis prévu du blé d’automne, à 3 cm, puis à 6 cm, et enfin à 10 cm de profondeur. Cela peut faire trois passages de machines, mais qui demandent peu de temps et un faible besoin en traction. Le dessèchement de la prairie est rapide. Mais il faut accepter de perdre la dernière pousse d’herbe.
- Si la météo est normale, on peut commencer par un déchaumage très superficiel, puis on laisse le sol se raffermir un peu, et au bout d’une à deux semaines, on termine par un labour à 10 cm. Explication : selon les situations, une charrue déchaumeuse ne retourne pas à 100 % le gazon, il reste en surface 0 à 20 % de prairie non ou mal retournée. Plus le réglage de la charrue est bien fait, moins il restera de l’herbe en surface. Par mesure de précaution, il est donc intéressant de « calmer » le gazon de la prairie par un déchaumage superficiel préalable avant de passer la charrue déchaumeuse.
- En conditions plutôt humides, les déchaumages ne permettent pas de dessécher correctement l’herbe. On se contente de faucher l’herbe très court et de retourner avec une charrue déchaumeuse ou une charrue normale pouvant labourer correctement à 10 cm. Puis éventuellement rouler pour bien retourner les mottes d’herbe encore partiellement dressées, et attendre un peu avant de préparer le lit de semence.
- Eviter la pâture en conditions humides avant la rompue. Le piétinement et les trous rendront impossible une destruction correcte de la prairie, et il y aura beaucoup d’adventices et des repousses de prairie dans le blé.
Pour réussir une destruction de prairie temporaire par façons superficielles, anticiper aussi bien que possible les conditions météo à venir, car le processus ne se fait pas en un jour.
MCL
Pour en savoir davantage
Film: destruction d'une prairie par un travail réduit du sol à 10 cm de profondeur (sur ce site internet)
Rapport des essais 2014 à 2016 (1.5 MB)
Rapport 2018 sur les essais pratiques de techniques culturales dans le soja, le maïs et les prairies temporaires (2.5 MB) (Ce rapport contient en particulier les résultats de la démonstration de destruction superficielle (sans labour classique) d'une luzernière à Senarclens VD le 28.08.2018)