Lors de la planification des semis de l’automne, il faut chercher à éviter une accumulation des facteurs à risques. Parmi eux, il y a la sensibilité des variétés. Ce critère sera mentionné dès l’automne 2018 sur les listes de variétés recommandées du FiBL.
La production biologique peut aussi être touchée par des blés fusariés : la maladie apparait lorsque plusieurs facteurs de risques sont cumulés. Ainsi, de fortes précipitations au moment de la floraison associées à des températures supérieures à 13°C, le maïs comme précédent cultural, le travail réduit du sol avec la présence en surface de résidus de culture contaminés par le champignon, la virulence de celui-ci, et des variétés sensibles de blé vont favoriser les infections au moment de la floraison. Celles-ci vont causer des pertes de rendement mais surtout de qualité, causées notamment par l’accumulation de mycotoxines dans les grains. Ces toxines, telles que le déoxynivalenol (DON), le nivalénol (NIV) et le zéaralénol (ZEA), sont dangereuses à la consommation, aussi bien pour l’être humain que pour le bétail.
Prévenir à tout prix
La lutte pratique contre la maladie passe par la prévention de l’infection et le contrôle de ces facteurs de risque via des mesures agronomiques (rotation diversifiée, place de la céréale, broyage des résidus et travail du sol, fumure adaptée, etc…) mais également l’utilisation de variétés tolérantes à l’infection et surtout à l’accumulation de toxines.
Précisons également qu'en agriculture biologique, on ne pratique pas de semis direct de blé après le maïs, car c'est beaucoup trop risqué.
Mécanismes de résistance
La résistance est un phénomène complexe qui repose tout d’abord sur des caractéristiques morphologiques et physiologiques de la plante. Par exemple, des tiges longues pour prévenir la contamination par du matériel fongique provenant du sol, une période de floraison courte et des épillets refermés permettent d’échapper à l’infection. De plus, les facteurs génétiques contrôlent indépendamment la résistance de l’épi à l’infection et la résistance des grains à la formation de toxines. Une variété résistante accumule un maximum de ces mécanismes de résistance.
Listes variétales
Si les indications de résistance sont disponibles sur les listes recommandées de céréales en agriculture conventionnelle et Extenso, de telles informations manquaient jusqu’à présent sur les listes variétales en agriculture biologique. Cette lacune sera comblée dès cet automne et permettra aux producteurs bio de veiller davantage encore à la prévention de cette maladie.
PER, extenso et bio
La pression de la fusariose est moindre en système de production biologique qu’elle ne l’est en Extenso ou PER. Cela peut s’expliquer par des techniques culturales qui limitent les risques d’infection (travail du sol, couvert végétaux, rotation diversifiée, absence de régulateur de croissance et apports azotés habituellement plus faibles). Plusieurs suivis des toxines dans les lots de céréales réalisés ces dernières années par Agroscope ainsi que les analyses des centres collecteurs, y compris lors de la récolte 2018, confirment des contaminations en toxines inférieures dans les lots de grains bio. Cependant, dans des conditions météo humides telles que celles de ce printemps, la maladie peut poser un problème pour la qualité de la récolte, y compris en bio. Si aucune vue d’ensemble n’est disponible pour le moment, les premiers retours font état de contaminations en toxines supérieures à la normale pour tous les systèmes de production, avec des foyers de contamination particulièrement élevés qui ont entrainé le déclassement de lots (d’alimentaire en fourrager ou de fourrager en déchets). Les informations sur le niveau de la résistance des variétés de blé recommandées en bio permettront de limiter ces risques. Par contre, les risques dans les conditions bio ne sont pas connus pour les variétés non inscrites dans la liste recommandée, mais produites sous contrat.
Observez impérativement vos cultures, puis vos grains !
L’infection du grain prédit généralement une contamination en toxines. Il en est de même pour les symptômes sur épi qui se reconnaissent par un échaudage progressif associé à une coloration rosée des épillets dès la floraison. Des contaminations peuvent aussi être relevées sans symptôme sur épi. Les grains fusariés sont reconnaissables à leur aspect déformé, avorté, fripé, avec une coloration rosée dans certains cas. La question de la contamination en mycotoxines se pose donc pour toutes les filières de valorisation. Dans un centre collecteur, des contrôles sont systématiquement effectués à la réception des lots. Par contre, dans le cas de vente directe, ces contrôles sont à la charge du producteur et valent la peine d’être réalisés en cas de doute.
Charlotte Martin, FiBL, Antenne romande