Essais en cours sur la régulation du souchet comestible avec des jachères noires

Le projet est réalisé conjointement avec Agroscope, le FiBL et la HAFL. Le principe de la jachère noire est de réduire aussi vite que possible la réserve de tubercules dans le sol par un travail du sol répété. Le travail du sol est effectué toutes les trois semaines environ dès le début de la période de végétation du souchet comestible, en mai, et jusqu’à début octobre.

Dans son essai, Agroscope compare deux machines (la herse rotative et le vibroculteur), en combinaison avec divers mélanges d’engrais verts (aucun, gélif et hivernant), qui sont semés fin juillet. La mise en place de mélanges d’engrais verts à croissance rapide et concurrentiels doit permettre de freiner le développement du souchet comestible et de maintenir la teneur en carbone organique. Une comparaison du nombre de tubercules par litre de terre au début des essais et après chaque période de végétation montre l’effet de chaque traitement.

Réduction de 60 % en moyenne avec un travail du sol pur
Après une année d’essai, une réduction du nombre de tubercules a été observée dans tous les procédés. Les diverses machines n’ont pas présenté de différences importantes, excepté dans une parcelle où la herse rotative avait été équipée d’un rouleau packer. Ce rouleau a eu tendance à favoriser la repousse du souchet comestible. En moyenne, la diminution relative du nombre de tubercules après un an s’est élevée à 60 % avec les méthodes consistant en un travail du sol pur avec sept à dix passages.

L’effet diminue avec un engrais vert
Dans les procédés avec engrais verts, où le travail du sol n’a été réalisé que jusqu’à fin juillet (cinq passages), la diminution se situait plutôt entre 20 et 40 %. Les conditions météorologiques ont été toutefois très favorables aux interventions mécaniques depuis 2022. Les essais se poursuivent jusqu’à fin 2025.

Au Liechtenstein, une ordonnance sur les mesures de lutte contre le souchet comestible (Erdmandelgrasverordnung, EMGV) est en vigueur depuis 2022. Elle prévoit la lutte obligatoire contre cette plante en cas d’infestation d’une surface au moyen de la jachère noire ou de la fauche intensive de prairies artificielles. En 2022, le FiBL et Klaus Büchel Anstalt (kba) ont débuté un essai on farm en collaboration avec les agriculteurs Georg Frick et Gebhard Walser. L’objectif est de suivre l’application de la lutte pour contrôler l’efficacité au moyen de données scientifiques et d’apporter ainsi un soutien à l’optimisation des mesures.

Quatre procédés en test
L’essai se compose de quatre champs avec à chaque fois quatre procédés par champ. Les procédés testés sont la jachère noire combinée à une fraise (S1) ou un outil traîné (S2), dont le sol est à chaque fois protégé en hiver avec un mélange de seigle et de vesce. Le FiBL compare la jachère noire avec une prairie artificielle fauchée intensivement (KW) et une rotation avec un déchaumage intensif durant la période estivale (FF). Comme dans les autres essais, des échantillons de terre sont prélevés en octobre à 0-20 centimètres de profondeur, les tubercules sont récupérés puis comptés et un test de germination est effectué.

La jachère noire est efficace mais elle endommage le sol
Après la première année, le nombre de tubercules a diminué d’environ 60 % (valeur médiane) dans les deux procédés avec la jachère noire. La deuxième année, ce chiffre est passé à 90 %. L’outil utilisé n’a pas joué de rôle. Le fait que la jachère noire a été très efficace et qu’aucun nouveau tubercule ne s’est formé s’est remarqué à la couleur complètement noire des tubercules. Toutefois, l’effet secondaire du traitement est l’endommagement massif de la structure du sol, déjà visible maintenant, qu’un agriculteur, lors d’une visite de cultures, a très justement comparé à une chimiothérapie.

Dissémination du souchet comestible dans la prairie artificielle et la rotation
Dans la prairie artificielle, le nombre de tubercules de souchet comestible a augmenté d’environ 60 % la première année puis a reculé d’environ 10 % la deuxième année. Dans la rotation, la hausse a été moins marquée la première année, avec 14 %, puis le nombre de tubercules est revenu à son niveau initial la deuxième année. Toutefois, c’est dans ces procédés que les différences entre les champs ont été les plus grandes. Dans un des champs, fortement infesté, le souchet comestible a été littéralement cultivé dans la féverole. La féverole, une culture avec un risque élevé d’enherbement tardif, n’est donc pas recommandée. L’essai se poursuit encore jusqu’à fin 2025.

L’essai de jachère noire de la HAFL cherche à déterminer la profondeur du travail du sol qu’il faudrait viser pour détruire le plus possible de tubercules de souchet comestible. Un travail superficiel (douze centimètres) est-il suffisant ou faut-il travailler plus profondément (22 centimètres) ? Les deux profondeurs de travail, combinées avec un mélange d’engrais verts (gélif et hivernant) et sans engrais vert, sont étudiées dans un essai en bandes Pour cet essai, la HAFL a prélevé des échantillons en octobre 2022 sur une parcelle fortement infestée du canton de Berne et déterminé le nombre initial de tubercules de souchet comestible dans trois horizons du sol (0-7 cm, 7-15 cm et 15-30 cm).

Travail du sol avec et sans engrais vert
La première année de jachère noire a débuté au printemps 2023 avec des conditions de sol très favorables, après la destruction d’une prairie artificielle. Un cultivateur à ailettes a été utilisé pour le travail du sol ; trois passage ont été effectués (13.6., 4.7. et 22.7.) dans toutes les bandes avec cet outil jusqu’au semis des engrais verts le 27 juin. Dans les bandes sans engrais vert, deux autres passages ont suivi (24.8. et 3.10.). La date à laquelle le travail du sol a été effectué s’est basée sur le stade du souchet comestible (3-5 feuilles). En octobre 2023, des échantillons ont à nouveau été prélevés, comme au début de l’essai.

Diminution des tubercules la plus importante avec un travail superficiel
Une première analyse montre que la jachère noire a permis une diminution efficace de l’infestation du souchet comestible. C’est le facteur de la profondeur du travail du sol qui a eu l’effet le plus important sur la diminution des tubercules. Avec un travail superficiel, une diminution de 63 à 70 % a pu être atteinte suivant les procédés. Avec un travail profond, la diminution ne s’est élevée qu’à 33 à 50 %. C’est aussi dans la couche de sol comprise entre 7 et 15 centimètres que la plupart des tubercules ont été trouvés, ce qui correspond à l’horizon du travail superficiel.

Les grands tubercules enterrés profondément présentent la faculté germinative la plus élevée
Autre constat intéressant, la faculté germinative des tubercules était d’autant meilleure que ceux-ci étaient enterrés profondément et que leur calibre était grand (faculté germinative de 76-78 %). Cela signifie que les tubercules disposent d’un potentiel important de repousse, même à une profondeur pouvant atteindre 30 centimètres. Le choix du mélange d’engrais verts a été encore peu décisif la première année et n’a pas eu d’influence négative sur la diminution des tubercules, en particulier dans les procédés avec un travail superficiel. Le mélange d’engrais verts gélif a tendanciellement montré un meilleur effet concurrentiel que le mélange hivernant. Il reste à voir si cela sera encore le cas la deuxième année. Cet essai se poursuit aussi jusqu’à fin 2025.