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Douteux (N° 9/10)
À propos des lettres de lecteurs d’Ernst Frischknecht et de Res Bärtschi publiées dans le bio actualités n° 8/2010
Quand Ernst Frischknecht écrit: «ne peuvent pas être discutées parce que des conventions administratives internes l’interdisent», cela me fait irrésistiblement penser aux très originales excuses du monde de la finance au sujet des parachutes dorés, des bonus etc. C’est quand même aussi comme ça que ça a commencé chez eux…
Comment réagirait-on si par exemple une coopérative bio refusait de communiquer ses recettes, ingrédients etc. parce que des conventions internes interdisent de les rendre publics (contrôle bio)? On ne peut en tout cas plus parler ni d’égalité des droits ni d’égalité de traitement! C’est tellement plus simple de débattre d’un Code d’équité valable pour le Bourgeon…
«Les critiques sont toujours étudiées soigneusement.» – Là je suis d’accord avec Res Bärtschi. C’est bien sûr aussi valable pour lui. S’il connaît si bien les motifs d’abandon des fermes biologiques suisses, pourquoi ne le prouve-t-il pas à l’aide des chiffres dont il dispose? Par ailleurs, Subaru Suisse m’a confirmé importer environ 90 pour cent de ses pièces détachées par bateau.
Quand je vois que des produits bio venus d’Ouganda sont vendus chez nous (bio actualités 1/2010, page 7, deuxième photo à droite depuis le bas), mes «cheveux d’écobilans» se dressent sur la tête! Tous ceux qui ont déjà été en Afrique connaissent les nuages produits par les échappements de ses camions diesel. Et il y a quand même plusieurs centaines de kilomètres jusqu’au prochain port maritime…
Ne doit-on pas se demander si l’interdiction du transport aérien des produits bio n’est pas tombée au rang de poudre aux yeux? Peut-être que, dans ce cas, l’écobilan serait même en faveur de l’avion… et qu’en est-il de l’interdiction du transport aérien pour les produits biologiques exportés? Est-ce que l’import-export, le va-et-vient, le transbahutement, le transbordement, l’embarquement etc. des produits biologiques vont vraiment dans le sens de la «chose bio»? Est-ce que cela fait vraiment partie des buts visés par les pères et mères fondateurs du mouvement bio? N’avons-nous pas déjà tiré bien audelà de la cible? S’arrêter et méditer!
Est-ce que «faire parler de soi» (écobilans) suffit réellement encore aujourd’hui? Est-ce que Bio Suisse n’a pas là une bien plus grande responsabilité morale que de simplement «soutenir pleinement»? Si le même système haïssable que celui du monde de la finance et de la bourse se cache derrière la magnifique idée d’origine de l’agriculture biologique, à quoi mènent donc tous ces chichis hypocrites? À la paix du marché ou de l’âme?
Alors, la main sur le coeur: le sperme sexé d’un taureau bio n’est-il vraiment plus bio parce que les spermatozoïdes mâles en ont été retirés? Sur ce point on a – et heureusement – avancé des arguments éthiques. Où restent-ils donc, ces beaux arguments, dans le débat sur l’écornage? A-t-on craint de trop multiplier les démissions en cas d’interdiction de l’écornage? Moi aussi je laisse une «empreinte écologique », mais elle doit être aussi faible que possible. Ce qui n’est pas le cas avec le «oui mais» au libre-échange, la course aux parts de marché etc. L’agriculture biologique a conservé une grande avance sur l’agriculture conventionnelle – ne la galvaudons pas!
Daniel Wismer, Rebelle Bio, Embd VS
La dynamique propre des organisations (N° 8/10)
À propos des «lettres de lecteurs mécontents » publiées dans le bio actualités
Les lettres de lecteurs mecontents foisonnent depuis quelque temps. Leurs auteurs sont mecontents de l’evolution de l’agriculture biologique et de sa toujours plus grande dependance vis-a-vis des grands distributeurs et des dispositions etatiques. Malgre la pluie de reproches, pas d’issue en vue.
Que s’est-il passe? Rien d’autre que dans d’autres organisations d’entraide paysanne. La dynamique propre de la croissance a presque n’importe quel prix a renverse l’institution. Pratiquement aucune organisation d’origine paysanne n’a reussi a maitriser cette dynamique propre. Et l’agriculture biologique semble elle aussi livree a ce destin. De tout temps les hommes se sont regroupes en organisations d’entraide. Les reussites des cooperatives agricoles ont ete magnifiques pendant presque un siecle. On a aussi trouve magnifique le Bioboom de ces quinze dernieres annees, mais depuis cinq ans Bio Suisse perd plus de membres qu’elle n’en gagne.
Comme une canne, les jeunes organisations ont toujours offert a leurs utilisateurs et a leurs proprietaires un soutien important dans leur lutte pour la survie. La canne etait facile a diriger. Puis elle a grandi car l’idee qui fondait l’organisation etait acceptee par tous avec un zele presque sacre. Au fil des ans la canne est donc devenue un gros pieu. Tout a coup elle n’etait plus seulement aide et protection, et la diriger exigeait deja une certaine habilete, entre autres parce que l’idee de base s’etait deja un peu estompee chez la deuxieme generation et que la survie personnelle etait pour beaucoup de cooperateurs devenue plus importante que la cooperative. Sans compter que les envies d’augmentation du chiffre d’affaires ont souvent amene l’organisation a prendre des decisions qui servaient plus a sa croissance propre qu’a la defense de son idee de base.
Les federations laitieres appartiennent aux paysans. Avec moins de lait ils gagneraient plus sans charger davantage les consommateurs et les contribuables, mais les surcapacites des federations qui font de la transformation ont besoin de plus de lait a des prix plus bas.
Quand les conseils d’administration paysans se soumettent aux envies d’expansion de leurs directeurs, les paysans deviennent les esclaves de leurs propres organisations d’entraide. Ce mecanisme n’a-t-il pas fonctionne exactement de la meme maniere pour les banques, finissant par les mener a l’effondrement? Comment cette loi d’airain pourrait-elle epargner la dynamique foisonnante de Bio Suisse?
Faire des reproches au Comite et a la Direction, c’est taper totalement a cote. Bio Suisse appartient aux producteurs bio. Ils pourraient changer le cours des choses si, animes par une analyse globale de la situation, ils veillaient a ce que Bio Suisse ne se limite pas a une autre forme d’agriculture mais signifie aussi une tout autre forme d’entreprise. Cela presuppose toutefois que les delegues soient assez forts pour accorder a l’image du Bourgeon une valeur plus haute qu’a l’obeissance servile devant la puissance commerciale des grands distributeurs.
Meme le souci somme toute amusant de certains fonctionnaires et politiciens de lancer La Suisse, Pays Bio le plus vite possible sur ses rails devrait etre freine au moins assez fort pour que la conventionnalisation de l’agriculture biologique ne doive pas devenir la condition de cette rapide expansion.
Si les raisons des rapides changements de directeurs ne peuvent pas etre discutees parce que des conventions administratives internes l’interdisent, il est par contre possible – et necessaire – de discuter des taches des delegues de Bio Suisse avant que des fondamentalistes mecontents et decus n’essayent de mettre en pratique les vastes reflexions fondamentales de l’agriculture biologique au sein d’une organisation dissidente.
L’agriculture biologique est en effet plus qu’une autre methode d’agriculture, et elle doit, aujourd’hui encore, etre capable d’autodetermination. Cela necessite cependant non seulement des directeurs et des scientifiques professionnels, mais aussi des paysans actifs qui utilisent leur intuition holistique pour empecher la canne d’antan de se changer en poutre ecrasante.
Ernst Frischknecht, Paysan bio, Président de Bio Suisse de 1993 à 2001
Questions et réflexions critiques au banc d’essai (N° 8/10)
Je suis toujours tres interesse par les lettres des lecteurs du bio actualites – les paysans bio actifs ne sont-ils pas la base meme du mouvement bio? Les questions et reflexions critiques sont importantes – trop de choses sont acceptees aujourd’hui sans esprit critique. Regina Fuhrer a deja repondu aux questions critiques sur la demission du dernier directeur. Certainement pas pour la complete satisfaction de celui qui les posait, mais tout ne peut pas etre publie dans la presse. Apres-coup on sait toujours tres bien quand le temps aurait ete bon pour faire les foins, mais cette connaissance n’a encore jamais fait secher un seul brin d’herbe. Tous les directeurs de Bio Suisse ont toujours ete choisis par des paysans et paysannes bio. Si on prend la peine d’y regarder d’un peu plus pres, on sait bien que c’est la un exercice particulierement difficile. Je souhaite a toutes les autres organisations et paysannes et a leurs comites de toujours choisir les bonnes personnes, car toutes les organisations ont un jour ou l’autre besoin d’un nouveau directeur – que ce soit pour raison d’age ou pour d’autres motifs.
Les affirmations d’Armin Capaul contiennent malheureusement un certain nombre d’erreurs. Les critiques sont toujours etudiees soigneusement! L’Assemblee des delegues des organisations membres de Bio Suisse (100 producteurs et horticulteurs Bourgeon engages) a donne au Comite le 18.04.2007 la competence d’introduire des complements de la marque. Un complement du Bourgeon pour les produits suisses etait aussi mentionne. Le Comite (7 paysannes et paysans bio elus par ces memes delegues) peut donc depuis lors introduire de son propre chef des complements de la marque. L’idee que la Coop aurait deja utilise la banderole Suisse avant cette date est une affirmation temeraire que les faits ne confirment pas.
La ligne ≪Bio-Weide-Beef≫ (Boeuf de Paturage Bio) n’a pas ete introduite par la Coop mais par la Migros – sans le Bourgeon et sans Bio Suisse. Je ne veux pas m’exprimer sur sa reussite ou son echec. La (re)activation de ce programme par la Migros a provoque a Bio Suisse entre autres choses beaucoup d’enervement et de travail supplementaire – un grand merci au systeme de points.
Armin ne veut et ne peut certainement pas lire tous les papiers de Bio Suisse, donc je signale que les bilans energetiques sont bel et bien thematises a Bio Suisse. Ils ne sont pas, comme l’affirme Armin, ≪consciemment reprimes≫ au nom de l’Offensive Bio en meme temps que les valeurs ethiques. Rien que l’interdiction des transports aeriens provoque deja une grosse economie d’energie (le nuage de cendre venu d’Islande nous a brutalement revele tout ce qui se transporte par les airs actuellement: meme les pieces detachees des Subaru viennent par avion …).
Et l’Offensive Bio n’y change rien: nous n’utilisons toujours pas d’engrais azotes de synthese, ce qui economise d’enormes quantites d’energie. Mais ce n’est la rien de nouveau, donc c’est barbant pour notre monde mediatise. Chaque paysan bio peut, doit et a la permission de faire plus, Bio Suisse soutient a fond la demarche, mais devons-nous vraiment en profiter pour ecrire de nouvelles directives?
Le fait qu’Aldi, Lidl et Denner ne recoivent pas le Bourgeon n’a pas pour premier objectif d’empecher les prix de baisser. Et ca ne marcherait de toute facon pas. La question est de savoir si ces riches proprietaires de chaines de magasins qui ne definissent les produits alimentaires que par le prix le plus bas doivent vraiment devenir les partenaires commerciaux du Bourgeon? Que se passerait-il si ces gens pouvaient diriger le marche bio? Assurement de multiples nouvelles et deplaisantes baisses des prix agricoles – et le nombre de demission augmenterait encore.
Voila qui me permet d’ailleurs de passer a cette question. Il y a certainement quelques producteurs en colere contre Bio Suisse parmi ceux qui l’ont quittee depuis 2004, mais il y en a aussi qui sont partis apres avoir vainement attendu que leurs subventions a la reconversion se renouvellent indefiniment (on sait bien que certains des 2000 nouveaux bio des annees 1995 et 1996 n’etaient pas suffisamment convaincus pour perseverer). Je dois malheureusement signaler a Armin que, parmi les paysans qui ont arrete ces derniers temps, on trouve surtout des gens qui ont arrete l’agriculture, pas des gens frustres par Bio Suisse. Je le sais parce que je vois passer la plupart des annonces de demission. Sur ce point je suis bien d’accord avec Lorenz et Armin: cette evolution est deplorable. Et je sais aussi que nous faisons tous tout ce que nous pouvons pour que ca change, pas tous au meme endroit ni de la meme maniere, mais tous dans le meme but. Une belle preuve de la (bio) diversite de notre mouvement.
Res Bärtschi, Lützelflüh, Paysan bio et président de la CLA (Commission de labellisation agricole)
L’engraissement au pâturage, ça fonctionne! (N° 8/10)
À propos de l’article «Pâturage obligatoire pour les bovins d’engraissement Bourgeon?» de Christoph Fankhauser, bio actualités 7/2010
Christoph, je suis tres content que Bio Suisse s’attaque a ce probleme. Cela me herisse depuis longtemps que la viande de boeuf Bourgeon ne doive pas etre produite au paturage. La plupart des bovins Bourgeon vont au paturage, mais justement ce n’est pas obligatoire… et il y a quelques engraisseurs professionnels bio qui font de l’engraissement intensif en stabulation avec parcours. Si les consommateurs le savaient, cela ne serait pas bon pour l’image de la viande de boeuf Bourgeon.
Venons-en aux aspects concrets mentionnes dans le bio actualites. Si on rend le paturage obligatoire, il faudrait etre coherent et faire paturer les betes du debut a la fin comme pour le betail laitier et d’elevage. Le controle serait en effet difficile – voire impossible – si on fait des exceptions au debut et a la fin de l’engraissement.
Techniquement cela ne pose aucun probleme, et la je peux parler en toute connaissance de cause: depuis le debut du programme Boeuf de Paturage Bio (BPB, en allemand BWB pour Bio- Weide-Beef) en 1998, nous avons mene 22’000 betes a l’abattoir. Et nous sommes justement en train de terminer le depouillement des donnees de 250 fermes de vaches allaitantes et BPB sur leur utilisation de mais et de concentres dans l’engraissement.
Le parcours et le paturage ne rendent pas les veaux malades – bien au contraire, cela leur fait du bien, et c’est toujours mieux que d’etre dans une stabulation ou l’air est de mauvaise qualite. Surtout que les veaux n’y sont en general pas places au meilleur endroit…
Le seul probleme pourrait venir des endoparasites si les veaux sont toujours dans un meme paturage qui leur est reserve. Et le plein air ne leur donne pas non plus la diarrhee, c’est un probleme de management. Vu que le programme SRPA autorise un acces permanent a un parcours pour les veaux d’elevage jusqu’a l’age de 120 jours, il en irait de meme pour les betes a l’engraissement. Cela veut dire que les betes n’auraient l’obligation d’aller au paturage qu’a partir de quatre mois si le paysan ne veut pas les y mettre avant.
Meme la fin de l’engraissement peut se faire sans stabulation. On atteint un bon etat d’engraissement avec de bons paturages, une bonne genetique, eventuellement une separation des males et des femelles, et eventuellement en donnant tout a la fin un tout petit peu de concentres aux boeufs. On peut le faire en les ramenant pres de la stabulation ou avec un automate pose au paturage. La finition en stabulation ne se justifie pas. Le BPB mise sur la SRPA+, ce qui veut dire huit heures de paturage par jour jusqu’a la fin, et 22’000 betes ont vecu ca sans problemes. C’est la realite vraie, et la qualite des carcasses est excellente (25 % C, 36 % H, 22 % T+) pour un age moyen de 21 mois et un accroissement journalier moyen de 780 grammes en tendance a la hausse. Il y a maintenant toujours plus de remontes provenant des troupeaux allaitants ou les automates a concentres sont les vaches elles-memes … Avec mon propre troupeau je suis maintenant en moyenne a un accroissement de 1100 g/ jour, un age moyen d’abattage de 14,2 mois, 86 % de betes H, 275 kg de poids mort, et tout ca avec 100 jours d’alpage pour tout le troupeau et sans un gramme de mais ni de concentres. Je crois que ces chiffres montrent qu’on n’a pas encore epuise tout le potentiel d’une bonne gestion des troupeaux au paturage.
Ce systeme ne comporte qu’un seul desavantage, la castration. Impossible en effet d’obtenir au paturage sans castration de la viande de bovins males lourds, c.-a-d. de 550 kg de poids vif. Ce serait trop dangereux avec les petits espaces que nous avons en Suisse. La castration permet de gagner en securite d’alper les betes, mais le plus important est que la qualite de la viande des boeufs est nettement meilleure que celle des taureaux. On perd un tout petit peu d’accroissement journalier, mais cela n’abolit de loin pas les autres avantages.
J’espere avoir reussi a montrer que l’engraissement au paturage fonctionne bien. Malheureusement cela n’est enseigne ni dans les ecoles ni dans les universites. On y apprend encore l’engraissement intensif bien que sa reputation commence a se degrader. Climat, Feed no Food, fourrages grossiers: autant de bons arguments en faveur de l’engraissement au paturage.
Eric Meili, FiBL
Sans cornes mais plus libres? (N° 8/10)
Les vaches sont de plus en plus elevees dans des stabulations libres et plus a l’attache dans des etables. Et on argumente que les cornes des vaches sont un danger pour les autres betes et pour l’homme et que l’ecornage est donc necessaire.
Aujourd’hui la majorite des vaches n’a plus de cornes. On supprime l’ebauche des cornes des veaux quand ils sont encore petits.
La securite est un argument massue que presque personne ne se permet de contester et qui est souvent utilise pour justifier l’ecornage. Or la veritable raison de cette pratique est que, pour des raisons economiques, les places a la creche sont trop etroites et les stabulations dites minimales de toute facon trop petites. La loi impose pour les places a la creche une largeur de 65 a 78 cm, ce qui est trop peu pour les vaches avec cornes: elles ont de la peine a s’y faufiler et doivent souvent mettre d’abord une corne dans le cornadis autobloquant qui est de mise partout avant de poursuivre l’operation avec la deuxieme corne. Cela pose des problemes surtout dans les situations de stress, par exemple quand elles sont harcelees agressivement par derriere par une autre vache et qu’elles doivent se depecher de ressortir du cornadis: leur reflexe est de reculer d’un bloc, mais elles restent bloquees par les cornes, ce qui les transforme en victimes sans defense. Les stabulations pour vaches a cornes doivent etre plus spacieuses et en particulier avoir des places a la creche beaucoup plus larges. Il faut aussi prevoir de larges voies d’esquivement. Les stabulations de ce genre coutent bien sur beaucoup plus cher, et c’est un fait dont on doit tenir compte. Les stabulations minimales qui rendent l’ecornage necessaire ont ete concues par des experts avant de recevoir la benediction de la protection des animaux … puis d’etre encouragees sur tous les tons par les paiements directs et la vulgarisation agricole. Il ne faut donc pas s’etonner qu’il yen ait autant aujourd’hui.
Donc, meme si les paysans prefereraient faire autrement, ils sont soumis a ces contraintes economiques. Les vraiment bonnes stabulations coutent tres cher. Qui peut encore se payer ca dans une agriculture devenue incapable de se recapitaliser elle-meme sur la seule base de l’activite agricole, ce qui est en Suisse le cas de 70 a 80 % des exploitations?
Puisque meme les paiements directs ne suffisent pas, 70 a 80 % des exploitations doivent trouver ailleurs l’argent dont elles ont besoin pour se financer. Que ce soit par le revenu accessoire de la femme ou du mari ou grace a l’AVS des parents qui vivent encore dans la ferme. On est deja assez loin dans le domaine de l’autoexploitation.
On mesure apparemment l’etat de l’agriculture a la taille de ses machines et des nouvelles stabulations qu’elle doit acquerir a cause des nouvelles legislations et des incessantes mutations structurelles, mais c’est une image trompeuse de bien etre pour l’observateur exterieur, une image reellement fausse quand on sait la hauteur de l’endettement et de l’autoexploitation qui en decoule.
Comment pourrait-on mettre fin a ce dysfonctionnement? Par exemple a laide d’un label ≪animaux naturellement avec cornes≫ et avec – a cause de l’augmentation des prix des batiments – un meilleur prix du lait et de la viande? Le consommateur est-il pret a faire les bons choix pour assumer sa coresponsabilite pour le bien-etre des animaux?
Car c’est bel et bien toute la societe qui est coresponsable du bien-etre des animaux. Et ca a son prix. On ne devrait plus chercher a adapter les animaux aux batiments pour economiser de l’argent mais a adapter les batiments aux animaux pour ameliorer leur existence.
Georges Stoffel, Paysan bio, Campsut-Cröt GR
Quand la protection de l’homme est aussi celle des animaux (N° 8/10)
Les transporteurs d’animaux et les employes des abattoirs travaillent souvent dur pour des salaires minimaux, et a des heures ou nous avons deja soiree libre ou sommes encore sous la couette. Et on leur serre encore la vis: pour pressurer encore plus d’argent de toute la filiere d’abattage, on importe a la semaine des equipes polonaises de bouchers payes aux pieces.
Un autre abattoir, qui fournit deux grands distributeurs tres conscients des prix, economise tellement sur le personnel que les journees peuvent atteindre 12 a 14 heures et que les chefs doivent travailler a la chaine d’abattage. Et grace au fait que les camionnettes de 3,5 tonnes n’ont pas besoin de tachygraphe, les patrons peuvent se montrer encore plus ≪flexibles≫ dans leur gestion du personnel et se contrefoutre des temps de repos. On a par exemple vu un jeune chauffeur participer a une formation continue de deux jours qui durait de 8 heures a 17 heures et devoir, pendant la nuit entre les deux, charger du betail et le mener le matin a l’abattoir!
Une telle exploitation des employes est indigne de notre pays et de ses entreprises. En tant que protecteur des animaux, je m’epouvante a l’idee des repercussions sur le bien-etre des animaux que peuvent avoir des conditions de travail aussi scandaleuses. Impossible en tout cas de garantir que les animaux de boucherie sont traites avec le minimum d’egards prevus par la loi.
La branche doit immediatement mettre fin a ces derapages. J’attends en effet de l’agriculture qu’elle reagisse, comme ce paysan qui a mis sur sa liste noire personnelle ce marchand de betail qui avait charge ses betes avec brutalite. Tant mieux, car si un transporteur se permet de donner aux betes des coups de pied et de baton, de leur tordre la queue et de pester continuellement quand l’eleveur est present, comment se dechainera-t-il quand il sera seul avec les animaux?
Dr Hansuli Huber, Directeur de la Protection Suisse des Animaux PSA, Bâle
Il serait judicieux et possible de se passer des antibiotiques (N° 8/10)
À propos de l’article «Diminuer, interdire? Les antibiotiques en question», de Kathrin Seidel et Markus Bär, bio actualités 7/2010
Nous sommes clairement d’avis que l’agriculture biologique doit et peut renoncer aux antibiotiques. Voila quelques annees que nous avons decide de ne plus en utiliser dans notre troupeau de 30 vaches. Pour que cela soit possible, il a fallu apprendre a penser autrement et a vouloir assumer soi-meme la responsabilite de ses animaux. La conviction qu’il est possible de soigner tout aussi bien avec les methodes alternatives a ete confirmee par la pratique.
Et nos vaches nous montrent leur reconnaissance en etant moins sensibles aux maladies.
Pia et Karl Stadler, Weingarten TG
Les questions critiques d’un paysan bio… (N° 7/10)
Les quelque 6 paysans et paysannes bio ont le droit d’avoir une information ouverte quand il s’agit de choses aussi importantes que la Direction. Monsieur Fluckiger a quitte Bio Suisse a peine quelques mois apres avoir ete choisi, soi-disant a cause de divergences de vues concernant les orientations strategiques. Vu que nous sommes tous membres de Bio Suisse et que nous payons des cotisations, j’ai les questions suivantes:
- Quelles sont les orientations strategiques qui ont ete discutees et qui ont provoque le depart du directeur Fluckiger?
- Combien de salaire ou d’indemnite de depart Monsieur Fluckiger a-t-il recu apres son depart?
- Combien la Coop paie-t-elle au total a Bio Suisse et au FiBL?
- D’autres grands distributeurs ont-ils ete approches pour des contributions?
- Ne serait-il pas plus intelligent de faire tester le futur nouveau directeur par quelques paysans bio au lieu de recourir a un centre d’evaluation?
Je vous prie de repondre a ces questions d’interet general dans le prochain bio actualites. Les orientations strategiques ne sont jamais coulees dans du beton, et il est interessant pour la base de discuter des differentes variantes, et tous en ont le droit. Les cachoteries d’inities ne nous meneront en effet pas bien loin.
Lorenz Kunz, Diemtigen BE
…et la réponse de Bio Suisse
Points 1 et 2: Stefan Fluckiger et Bio Suisse se sont separes d’un commun accord pour cause, selon le communique de presse incrimine, de divergences de vues concernant les orientations strategiques et leur application. Les deux parties ont par ailleurs convenu de ne rien dire d’autre. Bio Suisse etant liee par cette convention, elle ne peut donner aucun autre renseignement sur le depart de Stefan Flückiger.
Point 5. Ce sont des paysans et paysannes bio qui selectionnent le nouveau directeur: ce sont des membres du Comite qui menent les entretiens d’embauche, et c’est le Comite qui choisit la personne en tenant compte du resultat d’une evaluation externe a titre de regard exterieur complementaire.
Points 3 et 4: La marque Bourgeon appartient aux producteurs et productrices bio de Bio Suisse. Elle garantit des produits de premiere qualite et a une excellente reputation. Voila pourquoi Bio Suisse exige a bon droit des redevances et des droits de licence pour l’utilisation du Bourgeon. Cet argent permet a Bio Suisse d’assumer toutes ses taches comme la promotion des ventes, l’assurance-qualite, le marketing, la coordination du marche, le soutien de la recherche et de la politique en faveur du Bourgeon et de ses producteurs. Bio Suisse a encaisse en 2009 6,6 millions de francs de droits de licence. La Coop est le plus gros vendeur de produits Bourgeon, mais ces droits de licence proviennent aussi de nombreux autres preneurs de licences.
Je rappellerai volontiers ici, au sujet des possibilites de la base d’intervenir au sujet des orientations strategiques, que les delegues de Bio Suisse ont adopte en 2009 le nouveau Concept directeur apres avoir choisi entre plusieurs variantes issues des consultations de la base. Ce Concept directeur est un cadre strategique important. Les delegues dictent en outre continuellement la strategie de Bio Suisse en debattant des budgets, des comptes et des rapports annuels.
Regina Fuhrer, Présidente de Bio Suisse
Réflexions critiques sur Bio Suisse (N°7/10)
Les pionniers et diverses organisations se sont regroupes en 1981 pour creer l’ASOAB et le Bourgeon dans le but d’augmenter les ventes de produits biologiques suisses et de militer pour cela.
Il n’a pas fallu longtemps pour que le nom devienne Bio Suisse et le Bourgeon une marque protegee. Nouveau but de Bio Suisse: augmenter le chiffre d’affaires, produire plus. Coop s’en est melee et a integre le Bourgeon dans son Naturaplan. Coop a maintenant un bel assortiment Bourgeon, mais la plus grande partie vient de l’etranger. Les logos avec le drapeau suisse aident maintenant a reconnaitre les produits suisses, mais ces logos avec drapeau suisse etaient deja sur les rayons de la Coop avant que l’Assemblee des delegues ne les autorise.
Lorsque la Coop a lance le Boeuf de Paturage Bio il y a 10 ans, ca n’a pas marche, et aujourd’hui c’est la Migros qui essaie. La Migros ayant trouve trop peu de producteurs bio, elle a simplement pris aussi des producteurs PI – bien que la campagne se deroule dans le sillage du bio.
Migros avait aussi demande a Fidelio en 2009 si elle pouvait lui fournir tous les veaux Bourgeon dont elle avait besoin, et au debut 2010 elle arrete d’acheter des veaux Bourgeon! Aldi, Spar et Lidl vendent du bio federal et du bio Bourgeon sans le Bourgeon. Parce que les delegues de Bio Suisse ont instaure en 2009 un cartel contre les discounters, ceux-ci ne peuvent pas montrer le Bourgeon dans leurs magasins. Et la Migros fait probablement maintenant ce que Bio Suisse voulait eviter, c.-a-d. baisser les prix bio. Les produits Bourgeon ont malgre tout realise l’annee passee un chiffre d’affaires de 1,54 milliard de francs. Et le 1,8 million d’excedent de recettes a pose des problemes de repartition. La Confederation va probablement bientot repartir autrement son million de soutien au bio: aux 5 % de paysans qui ont encore de la consideration pour leurs vaches et leur laissent leurs cornes. (Ma proposition: 1 franc par jour et par vache = 365 francs de plus par annee et par vache pour le respect des animaux.) Bio Suisse a maintenant 29 ans et lance une offensive pour avoir plus de producteurs; fin 2009 elle en avait encore 5499. C’est apparemment plus la surface cultivee et moins le produit concret qui doit maintenant etre au premier plan. Les valeurs ethiques sont consciemment reprimees et le Bourgeon ne se preoccupe absolument pas de son bilan energetique. On a par exemple autorise le lait UHT en 2002 puis la poudre de lait en 2010 pour qu’on puisse traire plus de lait bien qu’une grande partie du lait et de la viande Bourgeon finissent sur le marche conventionnel. Ou encore, les prix bio ont baisse a cause de scandaleuses retenues. C’en etait apparemment trop pour les 821 paysans qui ont quitte Bio Suisse depuis 2004. En 2009, 46 rien que pour le canton de Berne.
Combien de temps le nom de Bio Suisse subsistera-t-il s’il y a toujours moins de paysans Bourgeon suisses – ceux-la meme que Bio Suisse laisse se debattre seuls dans les tourbillons du marche!
Armin Capaul, Perrefitte BE
Ce texte est celui d’un discours prononcé le 4 juin par Armin Capaul en tant que président du conseil d’administration lors de l’Assemblée générale de Fidelio Biofreiland AG.
Exagérations dignes du «Blick» (N° 6/10)
À propos du communiqué de presse «Bienêtre de l’animal et environnement en équilibre» du 4 juin 2010 de la station de recherches Agroscope Reckenholz-Tänikon
Avec sa perspective scientifique en contre-plongée trop focalisée sur le problème de l’ammoniac, la station de recherches Agroscope Reckenholz- Tänikon ART, qui dépend de l’OFAG, tire dans le dos non seulement des paysans suisses, mais aussi de la stratégie de qualité prônée par la conseillère fédérale Leuthard. «Les animaux heureux nuisent à l’environnement», dit en substance la station de recherche dans un communiqué de presse. On s’en frotte les yeux d’étonnement: tout le mouvement Bio et PI ne serait qu’une fumisterie, et les conditions d’élevage écologiquement correctes seraient donc les caillebotis intégraux, les clapiers et les batteries? Scénarios catastrophes, exagérations, demi-vérités et suppositions, rien ne manque à ce battage digne du «Blick».
Grâce à Reckenholz on sait enfin que les dégâts causés aux forêts par les tempêtes ne sont pas dus à la gigantesque puissance des vents d’ouragan – avant on appelait ça les forces de la nature – mais au méchant ammoniac émis par les déjections des vaches et des porcs heureux et qui infiltre les racines des arbres.
Et la population est menée en bateau: il serait irréaliste de vouloir diminuer le nombre d’animaux parce que le monde entier veut manger toujours plus de viande*. Comme si l’alimentation mondiale dépendait de la Suisse et que notre pays était un pays exportateur de viande comme le Danemark ou la Hollande, qui produisent deux fois plus de porcs que leur marché intérieur n’en achète, alors que la Suisse produit à peine les troisquarts de ses besoins intérieurs.
La réalité est que la production mondiale de viande a globalement doublé – et même quintuplé pour l’engraissement de poulets – ces trente dernières années. En Suisse par contre, la consommation de viande et le nombre total d’UGB ont nettement diminué. Bref, la production animale de masse augmente dans le monde entier tandis que chez nous elle diminue. Parler ici d’un grave problème généralisé d’ammoniac pour investir sur le dos des paysans et du bien-être des animaux des sommes colossales dans la recherche et la résolution technologique du problème est un pur non-sens, dégrade notre système de production alimentaire et ne sert qu’aux productions animales de masse à l’étranger qui, contrairement aux pratiques des paysans suisses, se fichent éperdument de l’environnement et du bien-être des animaux. Et cela d’autant plus que les paysans font déjà efficacement leur part en optant pour l’épandage à tuyaux souples.
Il serait bien plus approprié de mettre enfin le holà aux pratiques des cantons – p. ex. Lucerne – qui ont massivement augmenté la production animale depuis l’an 2000. On y épand quatre fois plus de lisier de porc à l’hectare qu’en moyenne suisse tandis que le gros des cantons ont moins de 1 UGB/ha. Dans ceux-là, les engrais de ferme et leurs composants azotés sont et restent ce qu’ils ont toujours été: une partie précieuse et utile d’une agriculture proche de la nature. Donc: Lorsque la charge en bétail est adaptée à la surface agricole disponible, l’écologie et les formes d’élevage respectueuses des animaux ne sont pas en contradiction!
Dr Hansuli Huber, Directeur de la Protection Suisse des Animaux PSA*
NdT: Ce passage se réfère sans aucun doute à une partie du texte publiée le 3 juin et corrigée le lendemain par l’ART et qui ne figure plus dans la version aujourd’hui disponible.
Une euphorie toute relative (N° 6/10)
À propos de la brève «Betterave sucrière: Il faut des producteurs Bourgeon pour 2011!», bio actualités n° 4/2010
Suite à l’article sur la betterave sucrière publié dans le bio actualités 4/2010, je me permets de nuancer «l’euphorie » quant à la reprise de la culture biologique des betteraves sucrières en Suisse pour 2011. Ayant pratiqué cette culture avec difficulté en 2007, 2008, et 2009, je constate les lacunes suivantes:
- La sucrerie de Frauenfeld ne nous assure pas chaque année la prise en charge des betteraves sucrières, ce qui n’est pas dans le respect du producteur;
- La vulgarisation est insuffisante sur le plan du désherbage mécanique et de la main-d’oeuvre nécessaire;
- Il est nécessaire de créer, en incluant les producteurs allemands, une association des producteurs de betteraves bio qui livrent à Frauenfeld (afin d’échanger sur les pratiques culturales et d’améliorer la technique).
Si les trois points ci-dessus ne sont pas remplis pour 2011, il est inutile de chercher de nouveaux producteurs. De plus, le prix est insuffisant et la marge brute trop basse, de toute façon incomparable avec le conventionnel. Il faut absolument à l’avenir atteindre en bio une marge brute comparable aux résultats conventionnels, au même titre que pour une céréale bio par rapport à une céréale conventionnelle.
Pour moi, la betterave reste une culture noble qui a de l’avenir. Elle doit aussi avoir le mérite d’être rentable.
Olivier Béday, Agriculteur bio, Montricher VD
Nous devons convaincre la majorité non paysanne (N° 5/10)
À propos de l’article «La Déclaration du Möschberg pour l’agriculture de demain», bio actualités 4/2010
Je peux soutenir l’intégralité du texte de la déclaration du Möschberg tel qu’il a été publié ce printemps, mais je me demande s’il est réaliste de vouloir mettre ces idées en pratique? Le point 4 dit que «Dans le monde entier, les petites structures de l’agriculture paysanne sont un élément incontournable du paysage.» Une bonne partie d’entre elles sont cependant déjà détruites même dans notre pays et même en région ce montagne!
Point 5: «[…] l’agriculture aujourd’hui dominante est prisonnière de structures dommageables pour la biodiversité et qui provoquent des injustices sociales.» (Or l’agriculture biologique est aussi prisonnière des structures citées ci-dessus.) Les coupables de cette misère sont tout d’abord nos autorités, la politique, l’enseignement agricole et, bien sûr, les grandes entreprises de transformation et les grands distributeurs. Si nous continuons comme ça, nous allons à mon avis à la catastrophe: crise de l’énergie (l’agriculture aujourd’hui dominante est très dépendante du pétrole et de l’électricité).
À propos de la pensée axée sur la croissance même en agriculture biologique et de ses conséquences sur la durabilité, je donnerai un exemple tiré de notre environnement immédiat, un domaine qui a été cultivé en conventionnel jusqu’en 1990, mais c’était une exploitation écologiquement durable. En zone de montagne 3, à env. 930 mètres d’altitude, des herbages souvent fortement en pente qui nourrissent des bovins en n’utilisant pas ou presque pas d’engrais chimiques. Le degré de mécanisation était encore adapté aux conditions (une motofaucheuse, plus tard une toupie et une autochargeuse). Une partie du domaine était pâturée à partir du mois de mai.
Si le temps était bon, la récolte du foin durait environ 1 semaine à la mi-juin dans les environs de la ferme et 1 à 2 semaines pour les parcelles plus éloignées. La récolte du regain se passait de la même manière depuis la fin juillet jusqu’à la mi-août. Il n’y avait pas souvent de troisième coupe car les prairies étaient presque toutes pâturées depuis la descente de l’alpage fin septembre jusqu’au début de l’hiver au début novembre. Le foin des parcelles les plus éloignées était consommé dans les étables qui se trouvaient sur place, ce qui évitait les longs transports de foin et de fumier. Et on se réjouissait chaque année au printemps et en été de la grande diversité de fleurs, de graminées et d’autres plantes qui poussaient dans ces prairies.
Ce domaine est maintenant cultivé depuis presque 20 ans par un paysan bio adepte de la croissance qui cultive entre 20 et 30 hectares au lieu des 6 de son prédécesseur. Au lieu de passer plusieurs semaines à faire les foins, l’efficacité de son parc de machines lui permet d’ensiler les mêmes surfaces en 1 à 2 jours. Au lieu de deux coupes et d’une pâture il fait 3 à 4 coupes plus de la pâture. Et il épand du lisier après chaque coupe. Nous observons cependant que la biodiversité de ces prairies a fortement diminué en moins de 20 ans.
La situation est un peu meilleure dans les parcelles plus en altitude, à partir d’environ 1200-1800 mètres, qu’il est obligatoire de faucher plus tard, mais là aussi les prairies souffrent des fréquents passages avec de lourdes machines. Ce n’est qu’un exemple parmi les centaines ou milliers d’autres qu’on pourrait présenter. Notre ferme, qui se trouve à 920 mètres d’altitude, compte 3,1 ha de prairie et de jardin et env. 2 ha de forêt, du côté ensoleillé, le plus souvent en pente. Ma femme et moi vivons depuis notre mariage en 1965 dans cette ferme que mes grandsparents et mes parents cultivaient déjà. Nous y avons vécu, travaillé et élevé cinq enfants. Nous avions 5 UGB, et le jardin contribuait beaucoup à notre autoapprovisionnement.
Nous cultivions par conviction nos terres selon la méthode organo-biologique, mais sans être affiliés à une organisation. Notre ferme est certifiée Bourgeon depuis 1995. Notre plus jeune fils Christian avait terminé son apprentissage horticole une année avant, et il s’est décidé à monter une petite entreprise maraîchère dans la ferme familiale. Avec notre aide et avec celle d’un frère et d’hommes en sevrage de drogue qui travaillaient sous notre surveillance, nous avons créé avec beaucoup de travail un beau jardin qui s’est ensuite agrandi au fil des ans.
Nous avons remis notre ferme à notre jardinier en 1999. Un jeune paysan ne pourrait pas vivre sur 3 hectares rien qu’avec du bétail, mais cette réorientation permet de réaliser un modeste revenu. En plus du jardin, il a 2 vaches allaitantes et 8 chèvres pour utiliser les prairies. La mécanisation est modeste pour notre époque: un transporteur sans autochargeuse, une épandeuse à fumier, une petite motofaucheuse, un motoculteur pour le jardin. Les légumes, les petits fruits et les fruits sont vendus en été au marché hebdomadaire de Klosters et à un centre de congrès en-dessus de Schiers. (Il a quand même aussi besoin d’une petite camionnette pour les transports, mais c’est aussi notre voiture familiale et nous avons roulé 90’000 kilomètres ces 12 dernières années.)
Une chose encore doit absolument être dite à propos de tout ça: la limite à partir de laquelle une ferme est considérée comme exploitation agricole a récemment passé de 0,5 à 0,75 unités de maind’oeuvre standard, reléguant plusieurs centaines d’exploitations agricoles – dont la nôtre – hors de l’agriculture professionnelle. Voici en réalité comment ça se passe chez nous: 3 unités de main-d’oeuvre travaillent à plein temps pendant le semestre d’été. Il y a le plus jeune fils comme chef d’exploitation, son frère, qui aide en été pour un petit salaire, et nous les parents qui représentons ensemble une unité de main-d’oeuvre. Nous ne sommes pas payés mais nous bénéficions du droit d’habitation.
Pour le moment ça n’a pas tellement d’importance, mais ça en aura bel et bien une quand il s’agira de reconstruire une étable ou de remettre l’exploitation. Ce serait encore acceptable si cette limite de 0,75 unité de main-d’oeuvre standard correspondait à la réalité, mais ce n’est le cas ni chez nous ni dans de très nombreux autres cas. Pour être juste, ce classement devrait se baser sur une expertise faite sur place (je pense p. ex. à un cadastre des fermes), comme c’est à ma connaissance le cas en Autriche.
Et de l’autre côté nous avons les grandes exploitations qui font le travail avec 1 ou 2 unités de main-d’oeuvre standard et une mécanisation très moderne et qui, pour tout pouvoir payer, doivent – et apparemment peuvent – travailler à l’extérieur à certaines périodes.
J’aimerais pour conclure répéter un point de la Déclaration du Möschberg et le souligner: «Il est impérativement nécessaire que la grande majorité non paysanne de la population reconnaisse de nouveau l’importance vitale – au sens littéral du mot – de l’agriculture et réapprenne à l’estimer à sa juste valeur. Ce n’est en effet qu’ensemble que nous pourrons réussir sortir du cercle vicieux de la production alimentaire dévoreuse d’énergie et de la destruction de la nature.»
Cherchons donc des voies pour faire connaître ces réflexions à un large public.
Christian Sutter-Reiner, Pusserein GR
Pour une agriculture biologique moderne (N° 5/10)
À propos de la brochure «Die Wurzeln des organisch-biologischen Landbaus» et de l’interview de Wendy Peter et de Markus Lanfranchi, bio actualités 4/2010
Honneur au travail des pionniers de l’agriculture biologique, mais leurs écrits demandent à être complétés! Par exemple, l’analyse de sol prônée par Rusch s’est avérée inutilisable et l’aération du lisier est une exigence à laquelle peu de praticiens se sont soumis. Les besoins des animaux n’étaient pas à l’ordre du jour du temps des pionniers, de même d’ailleurs que les techniques aujourd’hui largement répandues comme les transplantations d’embryons, l’affouragement de céréales à des ruminants ou encore les grands troupeaux de poules pondeuses. Ceux qui présentent aujourd’hui le conseil pour la reconversion comme un instrument d’optimisation des paiements directs sont dans l’erreur et vilipendent aussi bien les conseillers bio que les familles paysannes intéressées par l’agriculture biologique. Et ceux qui recommandent de remplacer ce conseil par un écrit totalement inadapté parce qu’obsolète et plein de fautes ne contribueront certainement pas beaucoup à améliorer la crédibilité de l’agriculture biologique.
L’agriculture biologique s’est sans aucun doute adaptée ces dernières années à des évolutions sociétales douteuses: la dépendance à l’égard du pétrole et à l’égard des consommateurs qui veulent dépenser toujours moins pour des produits toujours plus exotiques, et l’influence grandissante des processus industriels ont provoqué une perte de valeur(s), laissant un vide qu’il s’agit de combler. Les réflexions d’autrefois peuvent nous y aider et en fonder de nouvelles, mais elles doivent tenir compte des nouvelles connaissances et contribuer à montrer l’agriculture biologique telle qu’elle est: une forme d’agriculture très diversifiée et en plein développement qui se soumet en permanence à l’exigence de cultiver les écosystèmes en respectant leurs caractéristiques pour les rendre durablement plus productifs.
Robert Obrist, FiBL
Quand le bio pulvérise le lait, l’argent et la crédibilité (N° 5/10)
À propos de la décision de l’Assemblée des délégués de Bio Suisse d’abroger l’interdiction de la poudre de lait dans l’alimentation animale, bio actualités 4/2010
L’Assemblée des délégués a abrogé le 14 avril l’interdiction de la poudre de lait dans l’alimentation animale des élevages Bourgeon en Suisse. Le Comité avait argumenté sa recommandation d’abroger cette interdiction par l’amélioration de la qualité de la viande de veau grâce à l’utilisation de poudre de lait (le lait seul ne peut donc pas suffire?!) et par l’utilisation de poudre de lait suisse dans les élevages avicoles et porcins, car cela permettrait de conserver des sources protéiques produites en Suisse. Se posent maintenant pour moi les questions suivantes:
- À quel point cette poudre de lait est-elle vraiment suisse? Soyons honnêtes et reconnaissons que le lait transformé en poudre est exactement celui qui est produit avec des aliments fourragers étrangers: soja provenant des monocultures biologiques contrôlées d’Amérique du Sud, amidon de maïs de mégaproduction Bourgeon chinoise, céréales du Canada et autres produits du monde entier qui ont perdu leur plus-value biologique à cause des transports, des transformations et des doutes éthiques.
- À quel point une telle décision estelle équitable (la même Assemblée des délégués a décidé d’introduire le commerce équitable en agriculture biologique) à l’égard de nos clients que nous encourageons à acheter nos produits bio à coups de slogans comme «bio sans compromis»?
- Quelles conséquences l’affouragement de poudre de lait aura-t-il à long terme sur les poules? Les oiseaux ne sont pas vraiment des buveurs de lait… et les aliments atypiques ont toujours fini par provoquer des réactions inattendues chez les animaux!
- Quelle compréhension de l’économie et de la nature ont donc les paysans qui veulent produire du lait avec autre chose que de l’herbe puis doivent le transformer en poudre de lait en employant d’énormes quantités d’énergie (fossile?) pour finalement fabriquer de la viande de porc bio avec cette poudre de lait?
Cette décision ne pourra qu’encourager encore et toujours la surproduction de lait de vache, qui est la cause principale de la baisse catastrophique et sans fin du prix du lait, et envoyer un signal totalement incompréhensible à nos clients! On est bien loin des «bio sans compromis» et autres «champions de la nature». La fromagerie bio d’Andeer, par exemple, a obtenu le titre de champion du monde parce qu’elle fabrique du fromage avec du lait produit avec de l’herbe et du foin par des vaches de préférence avec cornes. Voilà les exemples à imiter!
Quand on voit comment nous nous développons actuellement en tant que Bio Suisse, nous devrions être cohérents et redéfinir la notion même de bio. Les décisions de ce genre sont en tout cas diamétralement opposées aux principes du tout récent Concept directeur de Bio Suisse!
Markus Lanfranchi, Verdabbio GR, Président de Bioforum Schweiz
Déclaration du Möschberg: SUPER! (N° 4/10)
À propos de la «Déclaration du Möschberg», pages 6 et 7 de ce numéro.
Möschberg, je suis fier de toi. J’ai d’ailleurs grandi à tes pieds.
Depuis mon apprentissage agricole en 1982-84, je m’entretiens très volontiers d’agriculture biologique. À cette époque déjà, alors que peu de gens étaient sensibles au bio, j’avais été enchanté de présenter à mes camarades de l’école professionnelle un exposé sur l’agriculture biologique et ses avantages. Je suis ensuite devenu paysan bio en 1997 dans une petite ferme de montagne, mais j’ai aussi toujours exercé diverses autres professions. Voilà donc ce que je pense de la Déclaration du Möschberg: SUPER! Un immense pas dans la bonne direction, mais réflexions et mesures pour aller plus loin ne doivent pas se faire attendre. J’ai entre autres aussi été laitier, et j’aimerais prendre ici l’exemple de l’affinage du fromage: qu’il soit à pâte dure ou mi-dure, un bon fromage à croûte lavée doit pouvoir mûrir de manière optimale aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur. Le processus interne – la Déclaration du Möschberg – démarre dès la production primaire et la caséification. Cependant, accélérer le mûrissement de l’extérieur signifie Brevibacterium linens, une bactérie magique qui donne au fromage un arôme magnifique en très peu de temps si les conditions d’encavage sont optimales.
- Allô les «Linens», où êtes-vous?!
- Le mûrissement est-il assez avancé des deux côtés? La réponse est Non! Alors voici un appel en forme d’ultimatum au «mûrissement extérieur» (nousmêmes sommes trop «à l’intérieur» pour assumer cette tâche):
- Créer en profondeur des conditions cadres sociocompatibles pour revaloriser la production primaire!
- Comment est-il possible que, dans le monde entier, l’ensemble des dépenses pour les besoins fondamentaux comme manger, boire et s’habiller ne représentent qu’une minuscule partie des transactions financières?
Alors … éthiciens, scientifiques, organisations de consommateurs, économistes, politiciens, artistes, spirituels, «critiques constructifs et idéalistes»: Contribuez à définir une nouvelle échelle des valeurs et à relever le baromètre de la valeur de l’alimentation et de la production primaire dans toutes les couches de la société! Les agissements socio-politico-économiques qui engloutissent les bases vitales des pauvres doivent être proscrits. Cela exigera de tous, riches et moins riches, un rééquilibrage des valeurs qui ne sera pas sans douleur! Mais je suis convaincu qu’en fin de compte tout le monde vivra mieux et plus sainement, et que la situation financière et l’estime des producteurs bio et de leurs produits n’aura plus rien à désirer! – Que Dieu nous y aide!
J’espère que ma lettre ne sera pas inutile et qu’elle ne te fait pas mal, cher Möschberg! En tout cas toutes mes félicitations et mes meilleures salutations bio!
Erich Steiner, Matten BE
Poisson d’avril? (N° 4/10)
Je viens de lire sur le site internet de la BDTA que nous devrons de nouveau tester nos veaux pour la DVB en 2011!
Contrairement aux prévisions des supergénies de l’OVF, ce dépistage doit être prolongé d’une année bien qu’ils aient dit au début que le cas était clair et que la DVB serait vite éradiquée. Les raisons de cet échec sont en cours de clarification. Je les attends impatiemment. Et on nous dit ça déjà maintenant pour qu’on ait bien le temps de s’y préparer. Quelle prévenance! J’ai toujours été d’avis qu’il était irrationnel de dépenser des millions à cause de quelques rares animaux atteints. Et maintenant on ne peut que dire oui.
Au moins les laboratoires et l’OVF seront à l’abri du chômage une année de plus. Ça c’est de la création d’emplois! – Mais qui paie??? Je vous le donne en mille! Et les fédérations d’élevage suivent bravement au nom de la santé animale. Ou alors pour soutenir une exportation de bétail qui n’existe de toute façon plus depuis qu’elle n’est plus subventionnée par la Confédération.
M. Hans Wyss de l’OVF a en outre évoqué la semaine passée sa vision pour le renforcement de son Office fédéral. Hourra, on attendait ça avec impatience. Cela lui permettra de mieux maîtriser les pantins que nous sommes pour lui. Il ne veut plus revivre l’affaire de la vaccination contre la langue bleue, où certains cantons ont trop écouté les paysans et ne les ont pas empêchés de ne pas vacciner. Alors on profite des réunions régionales pour peindre sur la muraille le diable des prochaines maladies.
Je commence à en avoir vraiment marre. Et vous?
Sepp Sennhauser, Rossrüti SG
Pour la responsabilité personnelle et contre l’obligation de vacciner (N° 4/10)
À propos de la lettre de lecteur intitulée «Langue bleue: SVP pas de ‹Vaccigraben›» de Peter Klocke, bio actualités 3/2010
Eh bien oui, Monsieur Klocke, je trouve vraiment préoccupant que le FiBL et Bio Suisse instaurent un concept de suivi homéopathique des dégâts de la vaccination contre la langue bleue.
Je ne critique pas ce que chaque paysan fait, chacun est libre de décider. Par contre, je ne peux absolument pas comprendre qu’une station de recherche consacrée au bio qui n’a jamais exprimé la moindre critique au sujet de l’injection toxique de la vaccination chimique contre la langue bleue assure maintenant le suivi homéopathique des «quelques dégâts et effets secondaires», qui selon ses propres dires ne surviennent de toute façon que dans les troupeaux à problèmes. Vous avouez en effet ainsi indirectement qu’il y a apparemment quand même eu beaucoup plus d’effets secondaires graves, car sinon vous n’auriez jamais eu une telle idée.
Le nombre de ceux qui ne vaccinent pas et qui veulent ce suivi est une confirmation supplémentaire. Il s’agit certainement de fermes qui n’ont vacciné ces deux dernières années que sous la forte pression des autorités, car à ma connaissance aucun de ceux qui ont refusé la vaccination n’a demandé ce suivi.
Je demande au FiBL et à Bio Suisse de prendre au sérieux les exigences de la base et de conduire les recherches et les suivis conformément à l’esprit bio. Et si vous aviez cherché le dialogue avec nous, les paysans, avant de lancer cet axe de recherche?
Pia Stadler, Weingarten TG
Langue bleue: SVP pas de «Vaccigraben»! (N° 3/10)
À propos de la lettre de lectrice «Ça ne peut quand même pas être vrai!» de Pia Stadler, bio actualités n° 2, mars 2010
Fondamentalement, tous les traitements médicamenteux peuvent avoir des effets secondaires. Selon notre expérience dans le suivi d’un grand nombre d’élevages, la vaccination contre la maladie de la langue bleue provoque sporadiquement des symptômes qui ont une relation au minimum chronologique avec la vaccination. Le FiBL n’a jamais rien dit d’autre à ce sujet. Le suivi homéopathique des vaccinations n’est pas un concept nouveau et n’a pas été développé spécifiquement pour la vaccination contre la langue bleue.
Le projet financé par Bio Suisse s’adresse aussi bien aux fermes qui vaccinent qu’à celles qui préfèrent ne pas le faire. Ces dernières sont d’ailleurs en nette majorité. Ce projet ne dilapide pas de l’argent pour soutenir les paysans qui vaccinent aux frais de ceux ne le font pas, mais il sert à élaborer un concept de suivi pour soutenir les éleveurs en temps de risques d’épizooties, et cela qu’ils vaccinent ou non leurs troupeaux. Je trouverais inquiétant que les paysans bio qui désirent vacciner leurs bêtes soient considérés comme indignes de soutien.
Peter Klocke, FiBL
Quand différentes mesures de lutte contre les épizooties se télescopent (N° 3/10)
État des lieux: L’OVF dresse un bilan pour la DVB, la diarrhée virale bovine, et doit constater qu’elle n’est toujours pas éradiquée. Les causes sont étudiées très méticuleusement.
Les fautifs sont les animaux porteurs non identifiés comme tels – ou les paysans qui déplacent des veaux trop vite (échantillon pas encore dépouillé). Une voie de contamination très directe est par contre totalement occultée: il s’agit de la vaccination contre la FCO (fièvre catarrhale ovine, ou maladie de la langue bleue). Retour sur image: Bio Aargau et Schweizer Bergheimat déposent lors de l’Assemblée des délégués du printemps 2009 une motion qui demande que Bio Suisse s’investisse pour la facultativité de la vaccination contre la FCO dès 2010. Une étude coûts-bénéfices a en outre été exigée de l’OVF. La deuxième partie de la motion disait ceci: «Le FiBL est chargé de chercher des méthodes pour soulager et guérir la maladie de la langue bleue ainsi que de clarifier la question de l’immunisation naturelle.» Cette motion a été acceptée à une forte majorité par les organisations membres de Bio Suisse. Il y eut par la suite à Berne une rencontre informelle de Bio Suisse, de l’Association Demeter, de Schweizer Bergheimat et du VKMB avec Monsieur Wyss de l’OVF. Divers points ont été discutés. Nous avons entre autres de nouveau exigé que l’OVF garantisse l’impeccabilité des produits des animaux vaccinés. Or la preuve n’a encore jamais été apportée que la viande et le lait ne contiennent aucune trace du vaccin ou de ses composants. (Quand on pense que tous les animaux de Suisse sont vaccinés en quelques jours!) Nous avons aussi discuté de la manière d’agir en cas de dommages liés au vaccin. Pour l’OVF tout était déjà dit: Il n’y a ni contamination des denrées alimentaires ni effets secondaires indésirables importants.
J’ai aussi posé la question de la responsabilité d’une campagne de vaccination qui utilise en règle générale la même aiguille pout tout un troupeau et même pour plusieurs troupeaux différents alors qu’un programme d’éradication de la DVB est en cours en même temps, ce qui signifie concrètement que, si j’ai dans mon troupeau un porteur sain de la DVB et que tout le troupeau est vacciné après lui, le virus de la DVB sera transmis à toutes les bêtes. Le même risque existe pour toutes les maladies – comme par exemple pour l’IBR (rhino-trachéite bovine infectieuse). La réponse de Monsieur Wyss a été extrêmement cynique: Nous en sommes conscients, mais c’est un risque calculé.
Calculé par qui, le risque? Par l’OVF? Par nous, paysannes et paysans? De grâce, qu’on arrête de nous prendre pour des idiots! Tout vétérinaire qui prend sa responsabilité au sérieux doit changer d’aiguille pour chaque animal! Ça prend plus de temps et utilise plus d’aiguilles – mais ça empêche la transmission de la DVB ou d’autres maladies.
Mais qu’est-il donc advenu de la deuxième partie de la motion? Le FiBL a démarré un projet de recherches sur la question. Ce projet doit suivre entre autres des animaux vaccinés pour empêcher les éventuels effets secondaires en utilisant des méthodes alternatives. Qu’on pardonne aux profanes que nous sommes d’en être extrêmement étonnés: on va étudier et suivre quelque chose qui officiellement n’existe pas ou n’a pas le droit d’exister. Cette approche de la recherche n’a plus rien à voir avec notre motion. Nous sommes curieux des résultats – je vais risquer un pronostic: grâce au suivi intensif avec des thérapies alternatives, il aura été possible de garder «en bonne santé» des animaux qui n’auraient pas été malades s’ils n’avaient pas été vaccinés.
Ulrike Minkner, Directrice de Schweizer Bergheimat, Mont-Soleil BE
Ça ne peut quand même pas être vrai! (N° 2/10)
À propos de la brève «Maladie de la langue bleue: Nouveaux concepts homéopathiques », bio actualités 1/2010
Qu’est-ce que je lis dans le tout dernier bio actualités, celui de février? Que Bio Suisse soutient et finance un projet de recherche du FiBL pour suivre les troupeaux qui ont été vaccinés contre la maladie de la langue bleue pour lutter contre les éventuels effets secondaires. Ça ne peut quand même pas être vrai! Puisque selon nos fédérations, l’OVF et les chimistes cantonaux il n’y a aucun effet secondaire. Même le FiBL a longtemps été de cet avis et a milité pour la vaccination. Et maintenant on veut tout à coup recourir à l’homéopathie après avoir vacciné.
Je me demande bien à quoi peut rimer un tel suivi par le FiBL? Il ne s’agit que de créer des emplois et de gaspiller de l’argent, en tout cas rien de concret! Si on n’est pas convaincu que la maladie de la langue bleue peut être traitée de manière alternative, il est contradictoire d’instaurer un traitement homéopathique après la vaccination. Cette année, grâce à la lutte opiniâtre des opposants à la vaccination, il est possible de refuser légalement la vaccination en demandant une dérogation. Chaque éleveur est donc libre de choisir.
Et il n’est vraiment pas non plus possible que les paysans qui ne vaccinent pas et qui portent eux-mêmes l’entière responsabilité de leur décision et de ses coûts doivent encore cofinancer – et via Bio Suisse! – les éventuels effets secondaires subis par ceux qui vaccinent. Mais qu’est-ce que le Comité de Bio Suisse a donc pensé là?
Le mandat de Bergheimat et de Bio Aargau disait que le FiBL devait premièrement développer des méthodes pour soulager et guérir les bêtes qui ont la maladie de la langue bleue et deuxièmement faire des recherches sur l’immunisation naturelle – pas instaurer un suivi des effets secondaires de la vaccination.
Pia Stadler, Weingarten TG
Quand on pense…! (N° 2/10)
Je n’ai besoin pour ma ferme en tout et pour tout que de trois articles de la nouvelle Liste des intrants 2010 du FiBL: un pour le nettoyage des ustensiles à lait, un pour les pierres à lécher pour les bêtes, et le dernier pour fixer l’azote dans le fumier et le lisier. Or la Liste des intrants pour l’agriculture biologique suisse compte maintenant 111 pages. L’agriculture biologique suisse est donc devenue si compliquée et difficile. Et cette liste ne peut pas du tout être utilisée pour les produits bio importés parce qu’elle est sous-titrée «pour la Suisse». Combien de pages faudrait-il alors pour les importations bio, par exemple de Chine ou de Nouvelle-Zélande?
– Quand on pense, quand on pense, quand on pense…!
Lors de la fête du FiBL le 16 août de l’année passée, j’ai demandé à un vétérinaire (dont je n’ai pas encore oublié le nom), qu’on m’a dit être compétent pour la maladie de la langue bleue, ce que le FiBL entreprenait contre la vaccination. Il me répondit qu’ils n’avaient pas reçu de mandat de Bio Suisse pour faire quelque chose là-contre. Et que cette vaccination était de toute façon inutile parce qu’il y a plusieurs souches de virus. Et voilà que le FiBL étudie maintenant sur mandat de Bio Suisse des concepts homéopathiques contre les effets secondaires de la vaccination contre la langue bleue. Et cela bien qu’il n’y en ait aucun selon l’OVF – ou seulement dans de très rares cas.
– Quand on pense, quand on pense, quand on pense…!
Il y a des années de cela, un meunier bio (dont je connais le nom) avait averti Bio Suisse, alors qu’elle faisait de la publicité avant l’émission Kassensturz de la télévision suisse, qu’elle devait faire attention à ne pas atterrir elle-même dans l’émission. Depuis lors Bio Suisse a reçu l’audience médiatique gratuite dont elle rêvait: elle a déjà été deux fois à Kassensturz. La première pour les importations, la deuxième pour le cartel Bourgeon.
– Quand on pense, quand on pense, quand on pense…!
La suite au prochain épisode, qui ne saurait tarder: «Un grand distributeur boycotte l’achat des veaux Bourgeon Bio Suisse». Les veaux élevés avec les fourrages de la ferme (lait, foin et herbe) ne doivent donc plus trouver preneur. Et Bio Suisse propose comme alternative des porcs engraissés uniquement avec des aliments concentrés (importés à 80 %). Où restent donc la souveraineté alimentaire, la conscience des cycles ou les bilans énergétiques?
– Quand on pense, quand on pense, quand on pense…!
Oui, les importations font fleurir les affaires du Bourgeon, et même tellement bien que de l’argent est rétrocédé aux organisations membres de Bio Suisse. Peut-être aussi pour museler les voix critiques de la base. Ceux qui font de la vente directe doivent quand même toujours acheter le matériel d’emballage Bourgeon. De même que d’autres personnes qui pensent de la même manière, je continuerai d’écrire ce genre de lettres de lecteur malgré l’argent du silence, et cela jusqu’à ce que l’équipe de Bio Suisse prenne ces faits au sérieux ou jusqu’à ce que le secrétariat de Bio Suisse se réduise à une simple boîte aux lettres quelque part en Suisse. Grâce au libre-échange agricole!
– Quand on pense, quand on pense, quand on pense…!
Armin Capaul, Paysan de montagne, Perrefitte BE
Déçu par les importations d’aliments concentrés (N° 2/10)
Après l’émission de Kassensturz sur les importations d’aliments concentrés, je suis très déconcerté par les directives bio pour l’alimentation animale et très déçu par «Bio» Suisse. J’ai commencé à acheter des produits bio parce que je voulais consommer de la viande, du lait et des produits laitiers d’animaux nourris EXCLUSIVEMENT avec de l’herbe. Apparemment cela n’est actuellement PAS possible avec des produits Bio Suisse.
Dois-je donc acheter de la viande d’Argentine, dont les bêtes sont nourries exclusivement avec de l’herbe? Où dois-je mieux m’informer auprès du FiBL de la portée du projet «Feed no Food»?
Simon Ferndriger, Zürich
Faites comme je dis, pas comme je fais ! (N° 1/10)
Lors du cours sur la production porcine organisé en décembre 2009 par le FiBL, Bio Suisse et les commerciaux ont insisté à l’unanimité sur le fait qu’il manque en Suisse plusieurs centaines de truies d’élevage bio et que la demande de porcelets bio ne peut de loin pas être couverte. En fait une bonne situation pour ceux qui élèvent des truies. Il est par contre pour moi totalement incompréhensible que le domaine agricole du FiBL ait arrêté la production de porcelets à la fin de l’année passée! Je trouve que le FiBL devrait au contraire marcher devant et montrer les opportunités pour l’élevage porcin biologique. Comment peut-on espérer motiver les gens à produire des porcelets bio si la seule ferme biologique «officielle» de Suisse prend la direction opposée?
Adrian Bieri, Boltigen BE
Donner plus de compétences à la Confédération pour éradiquer les épizooties? (N° 1/10)
À propos de l’article sur la facultativité de la vaccination contre la maladie de la langue bleue, écrit par Martin Bossard de Bio Suisse et publié dans le «Schweizer Bauer» du 6 janvier 2010
Cher Martin,
J’ai lu ton article d’opinion paru dans le «Schweizer Bauer» du 6 janvier, et j’ai été véritablement choqué que tu exiges que la Confédération ait davantage de compétences et de responsabilité financière dans le cas des épizooties «hautement contagieuses» et «à éradiquer». Je vois d’ici la mafia des pharmas et ses profiteurs – OVF, IVI et consorts – s’en pourlécher les babines!
Prenons la grippe aviaire puis la maladie de la langue bleue et enfin la grippe A: Si on a suivi comment ces maladies ont été sciemment et volontairement médiatisées et montées en épingle jusqu’à la nausée, comment un simple moucheron a été transformé en troupeaux d’éléphants et de mammouths, comment les critère de classification des maladies ont été soudainement modifiés en catimini pour pouvoir les présenter dans la presse comme beaucoup plus dangereuses qu’elles ne le sont en réalité, et enfin comment on attise la peur de mutations aussi hypothétiques qu’indésirables de tel ou tel virus, pas moyen d’espérer qu’une telle exigence débouche sur quelque chose de positif. Dans tous ces cas en effet, les intérêts qui tirent les ficelles ne sont que trop évidents.
Le fait que 20000 ou 30000 personnes crèvent de faim chaque jour fait partie de l’ordre des choses, mais quand 12000 personnes meurent en six mois d’une nouvelle maladie, celle-ci devient LE thème de l’année. Notre société a décidément bien perdu tout bon sens et même le sens de la mesure!
Que tu penses personnellement qu’il est nécessaire de conférer davantage de compétences à la Confédération pour lutter contre les épizooties dangereuses, je peux le comprendre et le respecter. Il est cependant totalement et définitivement inacceptable – surtout dans le contexte actuel – de présenter publiquement une telle exigence au nom de Bio Suisse! Ne dit-on pas que seuls les benêts fournissent eux-mêmes la corde au bourreau qui va les pendre?
N.B.: Je ne voudrais par contre pas laisser passer l’occasion de te remercier sincèrement, en même temps que toute l’équipe de Bio Suisse, pour avoir si bien géré l’application de la décision de l’AD au sujet de la vaccination contre la maladie de la langue bleue. Sincèrement, j’ai été positivement surpris par le sérieux avec lequel vous avez empoigné et accompli ce mandat!
Avec mes salutations les meilleures,
Maurus Gerber, La Sagne/Ste-Croix VD
Appel à tous les éleveurs (N° 1/10)
Avant même que la décision de l’OVF soit connue, des paysans et des paysannes ont reçu de la part de vétérinaires trop zélés des formulaires à signer pour la vaccination contre la maladie de la langue bleue.
Exagérations et déformations
– Grippe porcine: D’après les prévisions des autorités, 2 millions de personnes devaient être au lit en Suisse en automne et l’économie allait s’effondrer. Dernier bilan: 1 million de personnes ont été infectées – mais la plupart n’ont rien remarqué. La plupart des gens ne s’en sont pas laissé conter et ont refusé de se laisser influencer par cet alarmisme.
– Langue bleue: En 2009, pas une seule bête non vaccinée n’a attrapé la maladie de la langue bleue – et l’OVF continue de parler d’épizootie dangereuse. Et la vaccination doit rester obligatoire – assortie de dérogations – en 2010 bien que l’Allemagne et L’Autriche aient décidé de la rendre facultative et bien qu’elle n’ait jamais été imposée sur tout le territoire en Italie. Et ceux qui ne vaccinent pas leurs bêtes doivent participer aux coûts. Cette frénésie de vaccination est une affaire hyper juteuse pour les pharmas – ces pharmas dont nos services publics sont le bras armé.
Quelques faits au sujet de la frénésie de vaccination
– L’OVF n’a jamais reçu les documents d’homologation de certains vaccins.
– Le fabricant du vaccin ne l’a pas testé sur des bêtes portantes et allaitantes.
– Des vétérinaires ont utilisés la même aiguille pour plusieurs fermes.
– Les dommages liés au vaccin ont été systématiquement niés par les autorités.
– Les paysannes et les paysans qui ne vaccineront pas en 2010 devront payer comme les autres.
Voilà pourquoi j’appelle toutes et tous mes collègues à ne pas faire vacciner leurs bêtes en 2010, à ne rien signer et à ne rien payer. Nous ne pouvons pas être obligés de payer une prestation dont nous ne voulons pas. Que ceux qui veulent faire «protéger» leurs bêtes soient libres de le faire, mais qu’ils acceptent d’en supporter euxmêmes les frais.
Je n’ai jamais été un antivaccination. Je n’ai fait qu’exiger une signature qui me garantisse que le lait et la viande des bêtes vaccinées ne contiendrait aucun résidu toxique de vaccin. Je n’ai jamais reçu une telle garantie. J’appelle donc toutes les paysannes et tous les paysans à ne plus participer à cette farce – pour le bien de leurs bêtes et celui des consommatrices et des consommateurs. Et tout cet argent devrait pouvoir être utilisé à quelque chose de plus important.
Lorenz Kunz, Coprésident de l’Association des petits paysans, Diemtigen BE
TVA à taux unique: c’est jouer avec le feu ! (N° 9/09)
Monsieur le Président de la Confédération,
Voici le tout dernier proverbe paysan: «Quand le Conseil fédéral dit n’importe quoi, la situation change ou pas.»
C’est très bien, Monsieur le Président de la Confédération, de prendre position sur les problèmes de l’agriculture lors d’une foire agricole. Vous prônez une agriculture novatrice et flexible capable de résoudre elle-même les problèmes du marché. Je suis bien d’accord.
Il est par contre déplaisant que vous n’ayez pas dit la vérité à propos de la TVA! Les paysans qui font plus d’un demi-million de francs de chiffre d’affaire sont bel et bien soumis à la taxe sur la valeur ajoutée! Ce sont justement ceux que vous et votre collègue Leuthard réclamez, ces paysans novateurs, actifs et qui ont l’esprit d’entreprise (souvent plombé par de lourds investissements)! Au lieu d’améliorer les conditions cadres pour ces paysans, vous voulez les pressurer pour en sortir plus d’argent! Vu que les prix subissent une pression toujours plus forte de la part des grands distributeurs, il est illusoire de penser qu’on puisse ensuite répercuter cette augmentation de coût sur les produits.
Maintenant, essayez de vous représenter les conséquences de la TVA à taux unique: Si votre ami Marcel O. veut offrir une Ferrari à sa femme, il pourra le faire pour environ deux pour-cent de moins qu’aujourd’hui. En contrepartie, tous les pères de familles devront payer leurs achats alimentaires environ quatre pourcent plus cher. Et vous essayez de consoler ces pauvres diables en leur faisant miroiter une baisse des prix de l’alimentation en cas de libre-échange agricole; vous et moi (plus quelques autres) savons pourtant bien que ça non plus, ça n’est pas la vérité. Le cartel des grands distributeurs en profitera tout simplement pour augmenter ses marges. Il convient à l’actuel Conseil fédéral – vous n’êtes donc pas seul – de s’activer pour favoriser les plus riches, mais ce faisant vous menacez à long terme la paix sociale de ce pays. Au lieu de jouer avec le feu, vous feriez mieux d’avoir au Conseil fédéral une bonne politique pour l’ensemble de la Nation: p. ex. rémunération au prix coûtant de l’alimentation du réseau pour les petites usines (c’est normal dans l’UE), établir une législation anti-trust efficace (c’est normal dans l’UE), interdire strictement sur le plan international de copier les produits (p. ex. l’emmental) et de les vendre sous leur nom d’origine (c’est normal dans l’UE, cf. Champagne), etc. Tous ces désavantages sont toujours justifiés par les paiements directs; ce n’est pas sérieux. Dans notre ferme les paiements directs représentent environ cinq pour-cent du chiffre d’affaires, ce qui ne compense jamais les désavantages cidessus. Les paiements directs sont certes nécessaires – mais ce serait mieux de créer de bonnes conditions cadres pour les paysans actifs. Je vous souhaite la clairvoyance, la force et la santé nécessaires pour s'attaquer à ces grands problèmes.
Veuillez agréer, Monsieur le Président de la Confédération, mes salutations distinguées.
Samuel Otti, Oberwil BE
Après la vaccination obligatoire, la solidarité obligatoire? (N° 9/09)
Dans les négociations sur l’obligation de vacciner contre la maladie de la langue bleue, la Chambre suisse d’agriculture (CSA) de l’USP veut militer pour que les paysans puissent choisir eux-mêmes s’ils veulent vacciner ou pas. Cette décision tient compte du fait qu’aucun cas de maladie ne s’est déclaré dans les fermes qui ont illégalement refusé la vaccination.
Ce changement de cap honore la CSA et prouve qu’elle est sensée et capable de s’adapter aux nouveaux faits. Il est par contre moins compréhensible que le libre choix ne soit applicable que s’il est possible de constituer un fonds de solidarité général obligatoire que tous les paysans devraient alimenter – qu’ils vaccinent ou pas. Et en même temps ce fonds ne devrait payer aucun dédommagement aux éleveurs qui ne vaccinent pas. Cette clause est étonnante du point de vue des risques pris pour la recherche de solutions durables pour l’avenir. Les nombreux éleveurs qui ont refusé la vaccination n’ont de toute façon jamais eu le plus petit espoir de dédommagement dans le cas où le refus de la vaccination se révélerait être une erreur fatale – ou, comme les autorités l’ont toujours souligné, une preuve d’inconscience. Ils ont accepté et ils continuent d’accepter le risque de devoir supporter eux-mêmes les éventuels dommages. Et voilà qu’ils devraient maintenant assumer solidairement aussi les risques des autres, de ceux qui subissent des dommages à cause de la vaccination.
Du point de vue entrepreneurial, on punit donc justement ceux qui courent de grands risques pour la recherche sur les causes de cette nouvelle maladie, ce qui n’est possible que si on ne vaccine pas. Une telle clause ne serait jamais acceptée dans le reste de l’économie, alors pourquoi la CSA prône-t-elle ce genre d’idées? Ne devrait-elle pas au contraire être reconnaissante que des paysans prennent des risques pour la recherche fondamentale qui a été négligée par la recherche officielle parce qu’elle est financé non seulement par la Confédération, mais aussi et toujours plus par des fonds privés qui ne sont débloqués que s’il est possible d’avoir un retour sur investissement via des brevets? Malgré la crise, les pharmas réalisent de fantastiques augmentations de chiffres d’affaires et de bénéfices – tandis que la baisse des revenus agricoles accélère la disparition des paysans. Quand Monsieur Vasella gagne 40 millions de francs par année et un paysan 30 mille, les deux gagnent en moyenne si bien leur vie que la conseillère fédérale Leuthard peut exulter.
Une étude de l’université de Berne publiée dans le numéro d’octobre 09 de la revue «Agrarforschung» arrive à la conclusion que, au début de l’agriculture biologique, les échanges de connaissances entre les praticiens et les chercheurs ont joué un rôle central. Ce potentiel de collaboration a ensuite malheureusement été négligé. Le développement d’une agriculture réellement durable nécessite pourtant de faire revivre ces échanges de connaissances grâce à des projets et à des concepts interdisciplinaires. Les paysans qui, tous labels confondus, mettent volontairement leur ferme à disposition de la recherche sur la maladie de la langue bleue, offrent gratuitement les bases pour l’application des recommandations de l’université de Berne. Leur comportement plein d’initiative personnelle est ultramoderne et très entrepreneurial. Exactement ce que les cercles économiques recommandent à l’agriculture. On devrait en fait les récompenser – en tout cas pas les punir en les obligeant à participer à ce fonds pour les risques vaccinatoires.
Ernst Frischknecht, Tann ZH
Plus confiance en nos grands-mères que dans le bio (N° 8/09)
La dernière polémique suscitée dans le canton d’Argovie par les résultats d’analyses faites par le laboratoire cantonal sur 54 échantillons BIO, dont plus des deux tiers ne correspondaient pas aux normes BIO, le prouve: le BIO n’a pas autant le vent en poupe que l’on veut croire et faire croire. Il suffit de lire les réactions du public à la parution d’un article à ce sujet dans le journal de boulevard à grand tirage «Blick». Une avalanche de commentaires dans la veine d’un lynchage, ceci pour le niveau vox populi, et quelques voix timides essayant de tempérer. Même si on mettait en doute le choix de la rédaction de publier telle lettre plutôt qu’une autre, il reste néanmoins la nécessité de se poser quelques questions de fond, et non pas de marketing, pour générer l’information dont le public a besoin pour savoir et comprendre ce que représente réellement le travail du producteur BIO. Le «BIO sans compromis», c’est à dire irréductible et obtus, «stur» en allemand, est-il vraiment au diapason avec la nécessité pour une société de revenir à des produits de base de qualité? Qu’est un produi «conventionnel» en réalité? Nous voyons bien avec nos clients au marché que toutes ces notions sont très floues pour la plupart des consommateurs: pour eux conventionnel signifie un produit fait à la façon de leur grand-mère – image un peu simplifiée, soit, mais qui exprime bien leur envie de retrouver des goûts et des qualités qui tiennent du savoir-faire ancestral. En langue mercantile cela fait vendre, il suffit de changer de mot et de classer le produit sous l’onglet «Terroir». Et en langage technique enfin, c’est un produit dont l’étiquette ressemble à un dictionnaire de chimie.
D'où vient alors le BIO? Certainement du besoin de disposer d’un produit sain, pur et vrai. Combien de fois avons-nous entendu la remarque: moi aussi je fais du bio car je ne traite pas mes fruits et légumes. Façon assassine – car ô combien réductrice – de considérer le travail du producteur Bio, mais qui montre bien l’incompréhension et le manque d’informations de fond du consommateur. Les slogans, il connaît.
À notre avis, le Bio sans compromis exprime l’incapacité de dialouer avec le public, il s’érige en diktat contreproductif, comme un mur face aux producteurs Bio eux-mêmes. Que ce soit par ordonnance fédérale ou par règle interne (cahier des charges), on exclut toute approche en douceur de la problématique liée à la production de produits alimentaires honnêtes. À notre avis le Bio devrait être un état d’esprit, mais il est tout simplement devenu une niche de production et de marché, une «tendance» dans laquelle s’engouffrent brebis blanches et moutons noirs. Sectaire d’un côté, exploité commercialement de manière éhontée de l’autre, le Bio est en train de se fossoyer – en dépit des résultats mirobolants imprimés sur papier glacé. Et tout finira en industrie Bio, en immenses monocultures conformes au cahier des charges, en un non-sens qui devra défricher d’autres Amazonies pour rester rentable.
Ne nous laissons pas amadouer par l’industrie alimentaire, même Bio, et continuons d’avoir confiance en ce que nos «grand-mères» faisaient!
Onorio et Ruth Petralia, Producteurs bio à Ollon VD
Vaccination contre la maladie de la langue bleue: Lettre ouverte au Service vétérinaire (N° 7/09)
Au Dr R. Wyss, Service vétérinaire du canton de Berne
Monsieur,
J’ai concrétisé hier 12 août 2009 mon recours du 22 juillet en suivant l’avis de N. Blatter, l’avocat de la Direction de l’économie publique du canton de Berne. Aujourd’hui 13 août, convocation au poste de police de Moutier pour y fournir des renseignements sur notre situation financière, renseignements demandés par une décision judiciaire. Je m’y suis opposé et suis allé directement à la magistrature pour demander ce qui était en train de se passer. Et là j’ai pu voir une plainte déposée contre moi par vous-même, Monsieur Wyss! Et cela bien que, dans votre 4ème décision, vous m’ayez rendu attentif au fait que je pouvais faire recours dans les 30 jours auprès de la Direction de l’économie publique. Vous pouvez peut-être m’expliquer quoi ça rime? Et ce dossier ne pas un seul mot sur mes trois de position qui n’y sont bien é ment pas jointes, et pas un mot non plus sur le fait que j’ai recouru contre votre décision.
Monsieur Wyss, il ne s’agit pas ici d’articles de loi mais de la santé de mes bêtes. Je ne suis pas avocat mais paysan de montagne, spirituellement apparenté aux Indiens d’Amérique du Nord, ce qui signifie que je ne me cache pas derrière des articles de loi mais que je me tiens devant mes bêtes et que je les défends tant que la Terre Mère m’en donne la force! Je n’ai pas non plus besoin d’un avocat, je peux me défendre moi-même. Non, il ne faut pas me clouer au pilori mais m’écouter, lire mes prises de positions et essayer de comprendre ce qui m’arrive. Cette vaccination contre la maladie de la langue bleue m’a fait perdre six bêtes en 2008, n’est-ce donc pas encore assez? Je ne suis pas un antivaccination et je l’ai prouvé en 2008. Là je me suis contenté de ne pas vacciner et de vouloir mettre ma ferme à disposition de la recherche pour voir ce qui se passe avec les bêtes non vaccinées – mais vous avez dit que ce n’est pas prévu dans le cas de la campagne de vaccination contre la maladie de la langue bleue. Nous avons une ferme biologique, et si nos vaches ne sont pas des championnes, elles ont encore leurs cornes. Nous n’utilisons ni engrais chimiques ni pesticides, et maintenant vous exigez de moi que j’accepte qu’on injecte à mes bêtes des vaccins non homologués! Et en plus en automne quand les premières hirondelles s’envolent pour le Sud. Monsieur Wyss, vous avez déposé une plainte contre moi, mais je ne suis ni un meurtrier ni un braqueur de banque – j’ai une bonne réputation et j’écoute de la musique hippie dans l’étable. Je trouve important que vous sachiez ceci: vous pourriez retirer cette plainte et clore mon dossier – certains cantons le font déjà, notamment parce que les vétérinaires ne sont pas unanimement favorables à cette vaccination – mais je ne vous y forcerai pas … une chose est sûre, et vous pouvez tabler dessus: j’irai jusqu’en prison pour mes bêtes - car nous n’avons pas de quoi payer cette amende.
C’est en étant sûr que nous resterons en contact tant que le moucheron vecteur n’a pas quitté le pays que je vous adresse, Monsieur, mes salutations distinguées.
Armin Capaul, Perrefitte BE
Avis de disparition (N° 7/09)
Les plus âgés d’entre nous se souviennent certainement encore des quatre lettres RRSP (répond-t-il, respire-t-il, saigne-t-il, son pouls estil perceptible). C’est dans ce sens que j’aimerais poser une question à toutes les lectrices et à tous les lecteurs: quelqu’un sait-il où l’«Alliance bio des montagnes» a disparu? Elle a quitté la base sans laisser d’adresse ni de message. Quelqu’un l’a-t-il vue ou observée, ou aurait même seulement perçu un signe de vie? Prière d’annoncer tout indice au poste de police le plus proche. Vu que la «patiente» est certainement un peu désorientée et qu’il y a longtemps qu’elle voyage sans prendre la peine de se nourrir, on est prié de la traiter avec toutes les précautions nécessaires.
Daniel Wismer, Embd VS
Ça c’est du lèche-bottes! (N° 7/09)
À propos de la photo du directeur Manfred Bötsch parue à la une du bio actualités n° 6/09
La moutarde me monte au nez quand je regarde cette photo. C’est justement à cette personne qui veut mener l’agriculture à l’abattoir que le bio actualités accorde une grande attention! Pour moi ça porte un nom: faire du lèche- bottes.
Daniel Favre, Schuders GR
Juste et important (N° 5/09)
À propos de l’article «Chaux et chanvre contre feu bactérien et autorités», bio actualités n° 4/2009
C'est avec grand intérêt que j’ai lu l’article «Chaux et chanvre contre feu bactérien et autorités». Je trouve qu’il est juste et important de rechercher des alternatives aux épandages d’antibiotiques dans les vergers. Et pas seulement pour l’agriculture biologique. En tant que consommatrice, le fait qu’on trouve des résidus d’antibiotiques dans les pommes – contrairement à ce qu’on prétendait auparavant – me laisse songeuse. Et le fait que même les arboriculteurs les plus critiques refusent d’abandonner sans rien faire leurs arbres à cette terrible bactérie est évidemment plus que normal. Je salue leur initiative spontanée d’un grand coup de chapeau, et je souhaite que ces traitements débouchent le plus rapidement possible sur des résultats positifs scientifiquement prouvés.
Johanna Bernet, Fehraltorf ZH
Une initiative digne d’éloges (N° 5/09)
À propos de l’article «Chaux et chanvre contre feu bactérien et autorités», bio actualités n° 4/2009
Je félicite Christoph Meili et ses collègues pour leur engagement en faveur de méthodes alternatives de lutte contre le feu bactérien! Il faut pour cela des ressources que les concernés doivent fournir eux-mêmes en mettant énormément de coeur à l’ouvrage. C’est vraiment digne de grands éloges!
Nous espérons que ce projet réalisé en collaboration avec Bio Suisse et le FiBL sera couronné de succès. Une expérience nous permet d’être confiants: l’homme a toujours perdu toutes ses luttes CONTRE la nature, et ce n’est qu’AVEC la nature que nous pouvons trouver des solutions écologiquement éfendables. C’est dans ce sens que Grüne Thurgau –Thurgovie Verte, n.d.t. – vous assure de son indéfectible soutien.
Urs Oberholzer-Roth, Président de Grüne Thurgau, Romanshorn TG
Oui au commerce, non au recel! (N° 4/09)
Lettre ouverte à la conseillère fédérale Doris Leuthard
Madame la conseillère fédérale Leuthard,
Aucun paysan suisse n’a peur du marché-libre agricole! La Suisse m derne et le marché-libre agricole dans ce pays existent depuis 1848. La concurrence avec mes collègues suisses est saine parce que nous avons les mêmes conditions de production. Malgré toutes les conditions et prescriptions imposées aux producteurs, les prix des denrées alimentaires sont, proportionnellement au pouvoir d’achat des consommateurs, plus bas que n’importe où dans le monde!
Voilà pourquoi les spécialistes s’étonnent quand vous, Madame Leuthard, demandez que les prix des denrées alimentaires baissent encore pour obtenir une alliance politique aussi vaste que possible autour du projet d’accord de libre-échange avec l’UE. On doit cependant se demander sérieusement pourquoi les denrées alimentaires sont tellement meilleur marché dans l’UE! Bien qu’il y ait aussi des lois, des prescriptions et des conditions à respecter dans l’UE, d’une part elles sont souvent moins strictes, et d’autre elles ne sont, surtout dans les pays du sud en partie infectés par la Mafia, tout simplement pas respectée certificats et autres documents établis par les pays producteurs de fruits et de légumes ne valent souvent pas le prix du papier sur lequel ils sont imprimés! Le commerce de détail suisse est bien évidemment très intéressé par ce genre de produits parce qu’il y a là des bénéfices juteux à réaliser, mais l’importation effrénée de ces marchandises en Suisse n’a rien d’un commerce agricole libre et équitable. Elle confine au recel. Nous continuerons donc d’exiger une protection douanière efficace tant que ces problèmes ne seront pas clairement résolus. Tant il est vrai que même l’industrie pharmaceutique suisse est protégée contre le libre-échange!
Il saute aux yeux, Madame Leuthard, que vous êtes soumise à une forte pression exercée par «economiesuisse» pour vous convaincre que vous devez conclure avec l’UE un accord de libre-échange agricole. Vous devriez cependant aussi penser que, parmi les porte-parole de cette association se trouvent ustement quelques grands zéros en maière d’économie. Il n’est onc pas très opportun n’écouter que les autoés «leaders du monde économique». Sauf votre respect, j’ai de toute façon l’impression que vous n’avez pas de très bons conseillers en matière d’agriculture. Je vous conseille donc les écrits du professeur d’économie Mathias Binswanger sur la question. Et nous autres paysans suisses sommes aussi prêts à rechercher avec vous des solutions équitables.
Certes, il y a encore énormément à faire – but, yes we can!
Veuillez agréer, Madame la conseillère fédérale Leuthard, mes salutations distinguées.
Samuel Otti, Oberwil bei Büren BE
Encore un plan de relance … (N° 3/09)
Lettre ouverte au président de la Confédération Hans-Rudolf Merz
Monsieur le président de la Confédération,
Je m’adresse à vous pour une affaire très sérieuse. En ces temps difficiles j’ai, avec de nombreuses autres familles paysannes suisses, appris quelque chose de très important. Nous avons agi pendant des années de manière totalement erronée en essayant par tous les moyens à notre disposition d’empêcher notre patrimoine familial de sombrer dans l’abîme. Cela n’a souvent été possible qu’au prix de l’épuisement total de nos ressources corporelles et de notre santé. Le fait que les économistes néolibéraux (p. ex. ceux d’Avenir Suisse) se soient moqués de notre acharnement à survivre et aient méprisé notre faible productivité était certainement dur, mais nous continuions d’aimer notre métier, et cette satisfaction nous permettait de rester imperturbables. Nous avions même commencé à croire au marché libre et nous nous sommes armés pour l’affronter. Au moment où nous pensions avoir décrypté les lois du marché, catastrophe: soudain plus rien n’était juste ni vrai. Sans tambour ni trompette, le Conseil fédéral a (d’ailleurs sans aucune légitimation démocratique!) fait sauter les lois du marché et récompensé l’idiotie des chevaliers pillards et autres propres à rien en les arrosant de bon argent fédéral. Mais voilà, nous avons appris à apprendre, et nous faisons maintenant exactement comme les experts financiers des banques: investir immédiatement dans des projets aussi idiots que sans valeur. J’ai dû faire des efforts pour pouvoir vivre au-dessus de mes moyens (difficile de surmonter la force des habitudes!). Je suis maintenant en mesure de vous présenter le résultat avec la plus grande arrogance: un énorme déficit converti en parts d’objets de toute sorte dépourvus de toute valeur. Par exemple notre petite fromagerie, notre magasin fermier, nos machines agricoles, notre tunnel maraîcher: grâce à l’accord de libre-échange avec l’UE, ces investissement deviendront immédiatement des «subprimes».
Je vous demande donc l’octroi d’un plan de relance pour assurer le sauvetage des agro-investisseurs nécessiteux. Et il va de soi que nous nous efforcerons de continuer de payer grassement les cadres supérieurs de nos entreprises.
En vous remerciant d’avance pour votre écision et pour les milns qui vont avec, je vous Monsieur le président de la Confédération, mes saluta-tions les meilleures.
Samuel Otti, Oberwil b. Büren BE
Le je-m’en-foutisme commercial menace l’agriculture biologique (N° 3/09)
Voici le courriel que j’ai envoyé à la Coop aujourd’hui:
«Mesdames et Messieurs, Vous qui vous préoccupez de la recherche en agriculture biologique, vous devriez savoir que – même de ce côté-ci de la filière – tout ce qui brille n’est pas or. Les meilleures études de faisabilité ne servent à rien si les produits ne sont pas correctement présentés aux gens.
Avec mes salutations les meilleures, Egli, Stäfa»
Cela nous a été confirmé par écrit il y a quelques semaines: les légumes bio sont à peu près deux fois plus chers que les légumes conventionnels. Notre famille achète quand même des légumes bio depuis que la Coop en vend – moins pour nous accorder quelque chose de bon que pour aider cette forme d’agriculture à percer. C’était le cas jusqu’à hier. Maintenant j’en ai définitivement ras-lebol: carottes pourries sans date, salade verte datée qui se fane depuis trois jours à l’étalage, tomates non datées depuis des mois si ce n’est depuis des années… si la Coop ne comprend pas que les gens qui sont prêts à payer une certaine marchandise deux fois plus cher ont quand même le droit (!) d’avoir des produits frais, elle sera forcément victime de son succès. Je ne vois en effet plus aucune raison de ne pas acheter des légumes conventionnels meilleur marché ou même de me tourner vers l’épicerie du coin. Les légumes n’y sont certes pas bio, mais ils son frais et proviennent de la gion. Voilà bien plus d’un que je discute avec les responsables de la Coop de notre petite ville. Sans aucun succès. Qu’on le dise gentiment ou non. Ça coule comme l’eau sur les plumes d’un canard! Je suis d’ailleurs tellement déçu par cette nonchalance envers les acheteuses et acheteurs convaincus de produits frais biologiques (nous ne sommes pas que des richards de la rive droite du lac de Zurich!) que je veux aussi envoyer cette lettre à Bio Suisse, au FiBL et au magazine de consommateurs «Espresso». Car c’est toute l’agriculture biologique qui est menacée par ce genre de pratiques!
rnold Egli, Stäfa ZH
Une idiotie durable (N° 3/09)
À propos de l’article «L’agriculture biologique insuffle le développement durable dans la globalisation», bio actualités 2/2009
Madame Leuthard, ce ne sont pas les chercheurs en agriculture biologique qui doivent faire preuve de pensée globale et interdisciplinaire (ça fait depuis toujours partie de leur pain quotidien), mais les politiciens.
La pensée interdisciplinaire vous mettrait en effet soudain en position de réaliser que, sous la bannière du changement climatique, durabilité et globalisation sont deux contraires principiellement irréconciliables. Et si vous faites encore rentrer l’agriculture biologique dans le jeu pour rendre la soupe un peu moins immangeable, il s’agit dans le meilleur des cas d’une feuille de vigne censée tout cacher mais qui dévoile entre ses lobes la réalité dans toute sa dureté dans toute son amertume!
Ce dont nous avons besoin pour maîtriser les problèmes mondialisés du secteur alimentaire (entre autres), c’est le respect du principe de la souveraineté alimentaire de chaque pays en se basant sur des structures dont on garde la vue d’ensemble et sur les méthodes d’agriculture biologique. Tout le reste n’est que fumisterie et poudre aux yeux et nous amène globalement et durablement toujours plus près du gouffre!
Maurus Gerber, La Sagne/Ste-Croix VD
L’accord de libre-échange menace la protection des animaux agricoles (N° 2/09)
Une récente étude de l’European Coalition for Farm Animals (ECFA) brosse un tableau particulièrement choquant de la production por cine dans l’UE. Des dizaines de milliers de porcs, souvent malades ou incapables de se mouvoir, végètent dans des porcheries d’engraissement industrielles. Les truies et leurs porcelets sont routiniè rement parqués dans d stalles individuelles. C semblent être plutôt la l’exception dans les 60 examinées par l’ECFA en Hollande, en Allemagne, en Espagne, en Hongrie et en Angleterre. À l’exception des Anglais, la majorité des producteurs de porcs se foutent pas mal des directives bruxelloi- ses de protection des animaux. Bien que couper les queues soit largement interdit dans l’UE, 70 à 100 % des entreprises d’élevage coupent régulièrement et à vif les queues des porcelets. Et l’exigence légale de donner aux cochons de quoi s’occuper n’est pas respectée par 88 % des exploitations en Hollande, 98 % en Allemagne et 100 % en Espagne!
Ceux qui connaissent la politique de protection es animaux de l’UE ne seont cependant pas étonnés ar ces faits. Le scandale es transports d’animaux e boucherie reste le même puis des années. Au lieu e distancer sincèrement iques d’animaux et des pplices, comme le souorité des citoyens de l’UE, Bruxelles pratique en matière de protection des animaux la poudre aux yeux et la politique symbolique. De nouvelles prescriptions sont pompeusement annoncées chaque année aux populations inquiètes. Ces exercices n’apportent cependant généralement rien aux animaux agricoles européens, car ces dispositions sont souvent plus orientées sur les besoins des fabriques d’animaux que sur le bien-être animal, mais aussi parce que, comme vient de le montrer cette étude de l’ECFA, leur application est pratiquement inexistante dans de nombreux pays. Pour l’agriculture vue sous l’angle de la protection des animaux, tout cela n’augure vraiment rien de bon de cet accord de libre-échange avec l’UE que le Conseil fédéral appelle de ses voeux. La Suisse ne pourra rien faire pour contribuer à l’amélioration des conditions d’élevage et des transports d’animaux de boucherie qui sont de mise dans l’UE. Oui, nos importateurs de viande et tous ceux qui dans notre pays achètent de la viande étrangère ou en consomment dans les restaurants favorisent toutes ces formes de maltraitance des animaux pratiquées à l’étranger.
Un accord de libre-échange menacerait donc les acquis en matière de protection des animaux dans l’agriculture suisse et ouvrirait la voie aux fabriques d’animaux. Les organes de l’OFAG discutent d’ailleurs déjà de la suppression de la limitation des effectifs maximaux en production animale.
Dr Hansuli Huber, Directeur de la Protection suisse des animaux PSA
Les barbelés me mettent en rogne (N° 1/09)
À propos de l’article «Les barbelés doivent disparaître», bio actualités n° 10/2008
Je ne suis pas agriculteur et je n’ai pas de relation avec l’agriculture, et pourtant votre article, que j’ai d’ailleurs lu un peu par hasard, m’a fait très plaisir. Je suis en effet champignonneur, et même un champignonneur passionné. Je ne recherche pas en premier lieu à ramener le plus possible de champignons à la maison, mais aussi à me balader en dehors des sentiers battus et loin des cohortes de promeneurs, pour voir tout ce que la nature nous montre d’intéressant. Et cela me ramène à mon sujet. Vu que j’habite à St.-Gall, je suis souvent en route dans l’Appenzell, l’Alpstein et le Toggenbourg. Et dès qu’on s’éloigne des chemins, on bute sans cesse sur des barbelés.
Fixés et refixés, ils ne risquent pas de tomber... sans même parler des blessures qu’ils infligent aux bêtes sauvages, essayez d’imaginer combien d’éraflures ils m’ont déjà fait subir et à quel point ces maudits barbelés peuvent me mettre en rogne. J’en ai déjà parlé ou essayé d’en parler avec des paysans, mais rien à faire ni à espérer. Ce serait pourtant magnifique que ces barbelés disparaissent enfin.
Je constate par ailleurs sans cesse que les clôtures de barbelés sont installées jusque loin à l’intérieur des forêts. Or la loi interdit de faire pâturer les vaches dans les forêts. Avez-vous déjà vu à quel point les lisières des forêts sont massacrées de ce fait? Pourquoi ne fait-on pas appliquer cette loi?
Leo Boesinger, St.-Gall
Encore une idée purement bureautique! (N° 1/09)
À propos de l’article «Les barbelés doivent disparaître», bio actualités n° 10/2008
Rien à voir avec la pratique, tout simplement irréalisable: Dans l’économie alpestre, dans les zones de sous-bois, de buissons et de fourrés ainsi que dans les rochers, les clôtures électriques sont inutilisables. Encore une de ces prescriptions imaginées confortablement assis à un bureau ripoliné et bien chauffé.
J’aimerais attirer une fois de plus l’attention des protecteurs des animaux sur l’écornage des bovins. Respectueux de l’espèce? Compatible avec la protection des animaux? La plupart des bovins ont quand même des cornes.
Irma Imobersteg, Zweisimmen BE
Remplacer les barbelés par des fils ondulés (N° 1/09)
À propos de l’article «Les barbelés doivent disparaître», bio actualités n° 10/2008
C’est avec intérêt que nous avons lu l’article sur les barbelés publié dans le dernier bio actualités. Nous désirons compléter l’information sur les alternatives à ce type de clôtures.
Lorsque nous avons acheté notre ferme de Valengiron en 1995, tous les pâturages permanents étaient clôturés avec du barbelé. Nous avons alors développé une autre solution: le fil de fer ondulé de 3,3 mm de diamètre, qui est un des composants pour les clôtures en grillage ondulé. L’avantage par rapport aux autres systèmes de clôtures réside dans l’énorme effet de ressort de cette sorte de fil de fer. Si un arbre tombe sur la clôture, le fil se dérobe sans endommager les piquets. Une fois l’arbre enlevé, le fil retrouve de lui-même sa position initiale. Et son élasticité permet aux animaux sauvage de se glisser entre les fils sans se blesser ni endommager la clôture.
Comme pour le système Gallagher, le fil est sous courant. Le fil est tendu à la main. Les bouts des fils se laissent facilement former à la main en boucles que l’on suspend aux piquets d’angles. Sur les piquets intermédiaires, les fils sont libres de glisser dans les isolateurs. Les isolateurs doivent être munis d’un centre métallique pour résister à la forte sollicitation exercée par ce genre de fil. La simplicité des isolateurs permet de dépendre facilement les fils – par exemple quand on doit bûcheronner en lisière de forêt. Vu que nous avons aussi des chèvres et des moutons, le fil du bas est placé relativement bas, ce qui implique de faucher sous la clôture.
Nous répondrons volontiers aux questions par téléphone au 032 493 30 25. S’il y a beaucoup de personnes intéressées, nous organiserons une journée d’information dans notre ferme.
Familie Capaul, Perrefitte BE
Pas de libre-échange sans protection (N° 10/08)
Les syndicats nous montrent, à nous autres paysans et paysannes, la voie à suivre: Ils ont subordonné dès le départ le oui à la libre circulation des personnes à une protection efficace contre le dumping salarial. La conscience de la qualité du travail suisse ne leur suffisait pas. Nous leur sommes reconnaissants d’avoir évité d’un côté comme de l’autre l’émergence d’une spirale sociale descendante. Cette stabilité est indispensable à toute société en bonne santé. Et voilà venir le temps où la stratégie du «oui mais» pour les négociations sur l’accord de libre-échange agricole avec l’UE (ALEA-UE), dont les chantres prépondérants sont le comité de Bio Suisse et celui d’IP-Suisse, est soumise à une forte pression exercée par la base même de ces deux organisations. Il n’y a pratiquement aucun doute: si on n’assortit pas de menaces contraignantes la stratégie de qualité prônée dans ce cadre, une nette majorité se dessinera à bon droit lors de l’AD de Bio Suisse du printemps 2009 pour rappeler à l’ordre la direction et la contraindre à se oindre à la stratégie du refus de principe opposé par l’USP. ela aurait pour conséquence t de dominos qui isolerait la Communauté d’intérêts pour le secteur agro-alimentaire suisse (CISA), la privant des représentations paysannes et la rendant ainsi insignifiante. Les autres membres de la CISA, à savoir en particulier Coop, Migros, Emmi, Nestlé et les organisations de protection des consommateurs, feraient bien d’en prendre pleinement conscience. Il ne faut cependant pas en arriver là. L’école néolibérale est dépassée, et ça ne date pas de la crise financière. Cela a été abondamment prouvé: le libre-échange sans règles minimales, c’est comme se jeter dans un précipice. Les acteurs du marché continueront donc à se damner pour s’adapter aux normes sociales, écologiques et de (dé)protection des animaux les plus basses. Ce principe autodestructeur doit être renversé pour que le libre-échange puisse se transformer en commerce équitable prospère. L’article III du GATT (qui fait partie du règlement de l’OMC) dit qu’on ne peut pas traiter les autres pays moins bien que soi-même. Autrement dit, les règles valables pour les habitants du pays sont aussi applica- bles aux étrangers, donc les acteurs du marché doivent se hisser au niveau des normes les plus élevées. C’est aussi simple que ça. Il faut simplement faire preuve d’un peu de volonté politique. La stratégie de la qualité prônée par l’Alliance agraire doit donc être complétée par les exigences claires que voici: Les produits importés doivent respecter toutes les normes légales minimales en vigueur dans le pays importateur, faute de quoi il faut les frapper de taxes compensatoires ou égalisatrices. Ces taxes seront utilisées conjointement par l’UE et la Suisse en collaboration avec les syndicats et les organisations paysannes et de protection de l’environnement et des animaux pour égaliser les normes par le haut. Ce genre de dispositions peuvent être promulguées soit comme accord sectoriel potentiellement assorti d’une force obligatoire générale, soit comme une partie de l’accord de libre-échange. Sans cette exigence supplémentaire qui doit impérativement être reprise aussi par la CISA, je basculerai dans l’opposition lors de l’AD de printemps de Bio Suisse.
Felix Lang, Rohr b. Olten SO, Coprésident de Bio Nordwestschweiz, Membre du comité de l’Association suisse pour la défense des petits et moyens paysans (VKMB)
Stratégie qualitative – Un document qui manque de classe (N° 10/08)
La critique fondamentale que j’adresse au document de Bio Suisse concerne le fait que l’argumentation ne part pas du point de vue de la paysannerie bio: Bio Suisse justifie son «oui mais» en recourant à l’habituelle idéologie du marché. L’objectif de cette prise de position est d’adapter l’agriculture au reste de l’économie. Le point de vue du développement durable consiste par contre à mesurer l’économie à l’aune de l’agriculture biologique et à formuler une toute autre organisation du marché comme fondement du rétablissement de l’économie (voir à ce sujet divers auteurs comme Binswanger, Herrmannstorfer, Steppacher ou Moser). Ce document stratégique est révélateur par les contradictions incompréhensibles pour tout regard extérieur à l’agriculture qu’il contient. J’aimerais démontrer ici à titre d’exemple trois des nombreuses contradictions qui entachent ce document stratégique.
1. La production végétale n’est mentionnée ni dans les exemples ni dans le corps du texte. Une agriculture qui se veut durable ne peut pourtant pas se passer de la production végétale. Si la voie ainsi esquissée s’épuise à montrer que les produits fromagers de niche sont représentatifs de l’ensemble de la «Stratégie de qualité pour l’agriculture suisse», c’est le signe que les rédacteurs se sont par trop simplifié la tâche. Les produits de niche n’existent par définition que là où règne une production ordinaire, et c’est celle-là qui est concernée par le libre-échange agricole. Exiger de la Confédération qu’elle s’investisse en faveur d’une stratégie qualitative est certes une bonne intention, mais il convient cependant de se demander depuis quand la Confédération est la source d’innovation de l’agriculture biologique. (Citation de la prise de position: «… il faut cependant que notre ministre de l’agriculture opte pour une direction claire.»)
2. Citation de la prise de position: «Cette ‹Stratégie de qualité pour l’agriculture suisse› doit miser sur les normes les plus élevées pour que nos paysans puissent à la fois rester concurrentiels et compétitifs et produire des spécialités ininterchangeables. » Le fait est que Bio Suisse importe des denrées alimentaires de qualité Bourgeon surtout dans le secteur végétal (plus de 70 pour-cent pour les céréales). Mais voilà, ces producteurs étrangers fournissent la qualité requise – reste à se demander ce qu’il y a encore de suisse dans cette affaire?
3. Les banques suisses et l’industrie horlogère et métallurgique suisse doivent servir de modèles à l’agriculture suisse: cette idée s’étire comme un fil rouge tout au long de la prise de position. Ces images peuvent séduire, mais, à y regarder de plus près cette «idole» se révèle être plutôt l’ébauche d’une contre-image de ce qu’on souhaite pour l’agriculture suisse. a) Prôner les banques comme exemple de qualité vient d’être contredit de manière éclatante par la réalité. L’évolution actuelle de ce secteur parle d’elle-même et démontre de manière exemplaire quels dommages cause la doctrine pure de la pure économie de marché. Le Comité devrait, au moins sur ce point, s’arrêter un moment et se demander si la stratégie choisie est vraiment bonne pour l’avenir. Je veux dire que l’exemple est non seulement mal choisi mais encore préjudiciable à l’image de marque du Bourgeon. b) La clause du 50 % de valeur ajoutée qui doit être réalisée en Suisse pour qu’une montre puisse afficher «swiss made» est révélatrice. La disproportion des salaires pratiqués en Suisse et dans les pays asiatiques à bas salaires est telle qu’il suffit en général qu’une toute petite partie du travail soit faite en Suisse pour qu’une montre devienne swiss made. Presque tout le reste a donc été fabriqué à l’étranger. Impensable pour l’agriculture: soit le lait, les céréales ou les légumes sont produits sur sol suisse, soit ils ne le sont pas. L’actuelle discussion sur la «suissitude» montre bien que l’industrie veut pour la «provenance suisse» des règles complètement différentes de celles qui seraient nécessaires pour l’agriculture. Au lieu de suivre les idéologues du marché, qui ont reçu de la crise financière actuelle un véritable choc de réalité, le Comité serait bien inspiré de revenir aux principes primordiaux de l’agriculture biologique et de réclamer que l’agriculture redevienne le fondement même de l’économie. La voilà, l’option courageuse dont parlent les auteurs de ce document. Dans le contexte de la crise actuelle, l’économie et même les banques rêvent de «pédogenèse» (cette notion conférerait un sens nouveau à l’économie), mais, si même Bio Suisse rejette ce principe et défend la phraséologie du marché libre, elle galvaude ses possibilités d’exercer une influence réellement pragmatique.
Bertrand Bollag, Agriculteur, Wisechen, Diegten BL
Un bel autogoal, ou comment Bio Suisse vend lentement son âme (N° 10/08)
Cela a commencé par l’agenouillement devant le lait UHT et les mutilations des animaux (pas d’interdiction de l’écornage). Maintenant on s’asseye – sans faire voter les délégués bio – autour d’une table avec Nestlé et consorts («Impossible de nourrir cette planète sans les organismes génétiquement modifiés»: Peter Brabeck, 23 juin 2008) pour propager le «oui mais» au libre-échange.
Il faut faire preuve d’une naïveté et d’une incompétence politique quasiment illimitées pour ne pas reconnaître la force symbolique de cette image de Bio Suisse frayant avec une multinationale aussi impitoyable que Nestlé! Il aurait au moins fallu se méfier à partir du moment où une telle multinationale s’est engagée en faveur du libre-échange. La Direction Bio (y compris Herbert Karch du VKMB) semble avoir perdu la vraie sensibilité bio. Ou alors quelqu’un croit-il vraiment que ces conglomérats cotés en bourse se laisseront influencer par des «bonnes paroles»? Où restent la durabilité et la fermeture des cycles si toujours plus d’«oeufs bio» de Pologne, de «viande de veau bio» de Hongrie et de «salades bio» du Portugal etc. doivent garnir les rayons des magasins suisses?
Le fait qu’un accord de libre-échange européen – qui est nota bene tout sauf un don de Dieu – provoquera une nouvelle augmentation de la circulation et donc des émissions de CO2 ne semble pas préoccuper la Direction de Bio Suisse. Je n’ai en tout cas pas encore entendu un seul mot au sujet d’un l’écobilan des produits biologiques …
Et qu’on ne parle surtout pas des conséquences négatives qui toucheront la majorité de nos paysans! La minorité de ceux qui profiteraient d’un accord de libre-échange est pourtant sans commune mesure avec la masse de ceux qui y perdront. Est-ce cela, notre démocratie? Ah, au fait: La globalisation nous a offert la maladie de la langue bleue – le libreéchange assurera sa répartition équitable dans toute l’Europe.
Daniel Wismer, Rebelle Bio, Embd VS
Ernst n’a pas tout compris (N° 10/08)
À propos de la lettre de lecteur «Rétrospective fortifiante» d’Ernst Frischknecht, bio actualités 8/08
Je suis totalement d’accord avec beaucoup de choses qu’Ernst Frischknecht a écrites dans sa lettre de lecteur. Il n’est en effet pas logique de transporter tant et plus de maïs et de céréales dans les montagnes pour y produire du lait bio. Par contre, dans le contexte des futurs défis comme l’obligation d’avoir des stabulations libres et la diminution des contributions pour les terrains en pente, des contributions pour la garde d’animaux dans des conditions difficiles, des contributions pour l’agriculture biologique, etc., l’agriculture de montagne aura toujours plus de peine à couvrir ses frais de production. Alors quand il dit que «les fermes herbagères peuvent maintenant produire du lait sans problème, rentablement et sans acheter des fourrages», ce brave Ernst n’a pas compris la situation.
Hansjürg Fahrni, Oberthal BE
La réussite du mouvement bio (N° 9/08)
Lorsque nous avons pu reprendre à notre compte il y a dix ans la petite ferme bio que nous cultivons à titre accessoire, nous avons été contents que le contrôleur bio prenne le temps de voir les terres avec nous. Il nous a demandé de lui expliquer la production animale, nos projets pour les cultures et les idées de surfaces de compensation écologiques que nous voulions réaliser. Sans oublier le projet de construire une stabulation libre. Ses questions et remarques avaient alors complété et enrichi notre manière de voir les choses, et nous avions remarqué qu’il se réjouissait avec nous à propos de notre ferme, qu’il partageait avec nous le sentiment profondément bio qui nous avait amenés à reconvertir ce petit domaine.
Cette conviction de faire partie d’une humanité qui a besoin d’une nature intacte et d’avoir reçu en dépôt la terre que nous cultivions plutôt que d’en être les propriétaires s’est encore approfondie ces dernières années. Seulement voilà, les contrôles ont totalement changé depuis 1998. Indépendamment des personnes, les contrôleurs sont soumis à une forte pression temporelle, et la ferme est si petite que la visiter n’en vaut presque pas la peine – plus personne ne voit les cultures, et il n’y a plus d’échanges sur les questions professionnelles. La question centrale est maintenant de maîtriser les chicanes paperassières.
Il nous semble donc que toute humanité et empathie ont disparu des contrôles. Cela fait quelques années que j’ai le sentiment que le simple fait de me faire contrôler me rend suspecte et me transforme en tricheuse potentielle. Cela me rend songeuse: cette transformation des contrôles est-elle un épiphénomène ou quelque chose qui a saisi tout le mouvement bio?
Je suis bien consciente que le monde de l’agriculture biologique est lui aussi devenu extrêmement complexe et que les diatribes frustrées sont aussi inopportunes que la recherche de boucs émissaires, mais la disparition des manifestations d’humanité et d’empathie, qui ne se révèlent d’ailleurs le plus souvent qu’entre les lignes et dans des choses insignifiantes, est pour moi inacceptable. Il y a quelque temps, quelqu’un m’a envoyé un texte du Dalaï Lama. Il s’agit de préceptes pour la vie dans ce nouveau millénaire. Morceau choisi: «Mesure tes succès à l’aune de ce que tu as dû abandonner pour les obtenir.»
J’aimerais encourager toutes les personnes qui sont d’une manière ou d’une autre liées au mouvement bio à s’octroyer une minute de réflexion autocritique basée sur cette phrase. J’espère vivement que l’agriculture biologique saura rester – au sens propre de ces mots – profondément convaincue et holistique.
Claudia Staubli, Rünenberg BL
Maltraitance animale à Oberwil – L’avocat de la protection des animaux est une nécessité (N° 9/08)
Dans le canton de Bâle-Campagne, quelqu’un a si incroyablement abusé de trois petits veaux que deux d’entre eux sont morts des suites des blessures internes qui leur avaient été infligées. Alors même que la loi sur la protection des animaux prévoit jusqu’à trois ans de prison pour les cas graves de maltraitance des animaux, l’homme s’en est tiré avec une ridicule amende de 1500 francs. Quelles atrocités devront donc encore être commises pour que nos tribunaux prennent enfin réellement au sérieux les droits des animaux et cessent de traiter leurs tortionnaires avec des gants de velours? L’affligeant exemple bâlois montre à quel point l’avocat de la protection des animaux réclamé par la Protection suisse des animaux PSA est nécessaire. Nous avons réellement besoin d’un avocat des animaux pour défendre leurs droits dans les procédures pénales!
Dr. Hansuli Huber, Directeur de la Protection suisse des animaux PSA
Parfaitement d’accord (N° 9/08)
À propos de l’éditorial «Langue bleue: Contre l’obligation de vacciner» de Cäsar Bürgi, bio actualités 8/08
Merci à Cäsar Bürgi pour l’éditorial du bio actualités 8/08!
Ce texte dit tout haut ce que nous pensons tout bas! Dans notre ferme bio consacrée à l’élevage de moutons selon les directives Demeter, nous avons des discussions animées sur cette obligation de vacciner contre la langue bleue et nous nous posons les mêmes questions que Cäsar Bürgi. Nous aussi nous aimerions que Bio Suisse, le FiBL et même l’Association Demeter s’engagent pour une levée de l’obligation de vacciner.
Daniele Raselli et Sybilla Kölbener, Le Prese GR
Rétrospective fortifiante (N° 8/08)
À propos de l’éditorial «100 pour-cent pour, 100 pour-cent contre?» de Res Bärtschi, bio actualités 7/08
Merci, Res Bärtschi, pour avoir eu le courage, face à la crise qui menace de survenir à cause de la nouvelle réglementation des achats de fourrages, de regarder en arrière. Comment le bio a-t-il commencé? Quelles étaient les motivations des pionniers? Le savoir permet de transformer les crises en nouvelles chances.
L’agriculture du début du vingtième siècle a subi une vague de renouvellement, de spécialisation, de mécanisation et de chimification qui a atteint ses premiers sommets dans les années soixante. Certains paysans et scientifiques avaient identifié les écueils de cette évolution avant que le mal ne se révèle. Ils recherchèrent une voie plus durable dans la globalité, dans la fermeture des cycles et dans la connaissance des processus qui se déroulent dans le sol. La voie bio (voie de la vie). Vers la fin du siècle, le bio – la voie globale et naturelle – était devenu assez fort pour que la grande distribution, la politique agricole officielle et la formation agricole ne puissent plus l’ignorer. Elles ont pris amicalement et précautionneusement le bio à bras le corps et ont tout fait pour le sortir de sa réputation «soccolis-macramé» et en faire une agriculture entrepreneurial C’était une bonne chose, mais le peut parfois être l’ennemi du bien.
Dans le même bio actualités, Peter Kunz décrit la problématique de la sélection céréalière. À quoi les succès de sélection des cinquante dernières années ont-ils mené? Toujours au même phénomène: au début on a salué les augmentations de rendement avec enthousiasme, et lorsque la face sombre de ce progrès a commencé à apparaître, le concept était déjà tellement ancré dans la formation, la vulgarisation et la recherche que les efforts pour corriger le tir ont presque toujours été perçus – et combattus – comme jérémiades fondamentalistes et crachats dans la soupe. La généralisation de l’intolérance aux céréales (coeliakie) chez les consommateurs, l’impossibilité de faire de la production laitière «moderne» en zone de montagne sans acheter des fourrages complémentaires, ou encore l’allongement continuel des listes d’intrants autorisés en bio, tout cela pourrait nous amener à reconsidérer ce slogan «100 pour-cent pour ou 100 pour-cent contre». Il y a soixante ans, sans séchage en grange et avec peu de volume d’ensilage, il était pratiquement impossible de rentrer les fourrages au moment où l’équilibre entre l’énergie et les protéines permet la plus grande productivité laitière (fin de l’épiaison). Les pissenlits étaient à peine en fleur qu’on essayait de récolter quelques remorques pour relever la valeur du foin trop vieux qu’on allait forcément récolter ensuite.
Aujourd’hui, les progrès réalisés dans le domaine de la récolte des fourrages grossiers permettent de rentrer toute la récolte en peu de temps. La devise «faucher le plus jeune possible» s’est imposée au point que la première coupe et toutes celles qui suivent sont trop précoces. Le surplus de protéines fait bel et bien augmenter le rendement laitier, mais les vaches souffrent alors d’un manque d’énergie. Impossible donc de se passer de maïs ou de céréales – et il faut souvent les acheter. Et l’intensification de la fumure azotée – même faite avec du purin – renforce encore l’influence négative des protéines.
Si on tient compte de ces circonstances, on s’aperçoit que les fermes herbagères peuvent maintenant produire du lait sans problème, rentablement et sans acheter des fourrages. Le lait est même alors plus sain car plus riche en acides gras oméga 3. Cent pour-cent pour une agriculture biologique globale et en accord avec la nature sera donc le modèle de l’avenir, car ce n’est qu’ainsi que l’agriculture de montagne, avec ses bien réelles prestations multifonctionnelles, méritera ses paiements directs. Mais celui qui veut faire du bio à cent pour-cent en sélectionnant sur la haute productivité laitière et en misant sur la production de masse tente un grand écart qui finira tôt ou tard par le déchirer.
Le bio promet des valeurs supérieures grâce à ses méthodes de production conçues en fonction de la nature et du cycle de la ferme. Les conditions posées par les directives bio peuvent de prime abord sembler dures, mais elles peuvent aussi se révéler être une grande chance sur la voie qui mène au positionnement supérieur du Bourgeon et donc à sa réussite sur le marché.
Ernst Frischknecht, Tann ZH
Bio Suisse soutient le projet de libre-échange avec l’Europe (N° 6/08)
La présidente de Bio Suisse déclare à qui veut l’entendre que le libreéchange agricole avec l’Europe est une chance pour les produits estampillés Bio Bourgeon.
Comment pouvons-nous associer la culture biologique à ce projet de déréglementation? Il faut vraiment ne pas avoir saisi quels sont les enjeux et quelles sont les conséquences pour l’environnement dans le sens le plus large du terme. Qu’est-ce que le libre-échange, donc l’ouverture des frontières?
Appelons un chat un chat: le libre-échange, c’est de la déréglementation et de la défiscalisation à la frontière. Pour comprendre la portée de cette politique il faut penser vie sociale, vie communautaire, qualité de vie. Les produits agricoles ou autres, qui sont du pays, ont créé de l’emploi, donc de la richesse, cette dernière a engendré des impôts, donc elle profite à toute la communauté. On peut parler de redistribution. Si ces mêmes produits sont importés sans prélever de taxe à la frontière, c’est l’importateur qui se met dans la poche la plus-value réalisée par le transfert d’une production d’une région à faible coût vers une région à coût plus élevé. Ce produit va non seulement concurrencer la production locale (dumping), mais le profit réalisé ne va rien rapporter à la communauté. Cette défiscalisation, en créant des profits importants, encourage et développe le transport de marchandises à travers le monde. C’est une source importante de pollution mais également, indirectement, une des causes de la crise alimentaire dans les pays pauvres qui sont exportateurs de produits agricoles. Cette défiscalisation encourage la délocalisation de la production. Les multinationales de l’agro-alimentaire n’hésitent pas à soustraire les terres arables à l’agriculture vivrière pour y semer les denrées qui inondent les étals de nos magasins. La déréglementation, c’est aussi la suppression des mesures de protection de la production locale à la frontière. Ces mesures sont de différente nature, il y a les contingents qui limitent le volume d’importation, mais aussi par exemple les mesures de protection de nos normes de fabrication.
En soutenant avec force le projet de libreéchange avec l’Europe, Bio Suisse a choisi le camp des artisans de la déconstruction de la société. Leur politique est simple: moins d’État, moins de règles, moins de collectif, moins d’impôts, et surtout pas de protectionnisme. Ces gens n’attachent plus aucun intérêt à la vie communautaire, aux valeurs qui fondent une société et qui nous donnent des raisons de vivre ensemble. Ils ont oublié l’importance du tissu social et du tissu industriel. Un tissu, c’est un grand nombre de fils qui sont interdépendants, vous en tirez un et vous fragilisez le tout. La déréglementation est en train de fragiliser notre tissu social, elle nous rend individualistes et insensibles à l’avenir de notre voisin. Une société qui reconnaît l’importance de protéger ce tissu social est une société qui attache de l’importance au collectif, en cela elle est beaucoup plus juste et respectueuse des valeurs.
En favorisant des profits colossaux, la politique du libre-échange a permis à des entreprises de devenir tellement puissantes financièrement qu’elles sont devenues nuisibles pour la démocratie. Le film «La vie selon Monsanto» nous en donne un bel exemple. Bio Suisse défend le principe de la globalité d’entreprise, mais quel sens cela a-t-il si on ne s’intéresse qu’au produit et à ce qu’il contient. Ne plus tenir compte de l’environnement dans un sens large, c’est faire du Bio hors-sol.
Nous, nous qui respectons le cahier des charges de Bio Suisse et dont les produits portent le Bourgeon, nous nous désolidarisons de la politique néolibérale de Bio Suisse. Si le Comité de l’Association ne change pas de cap, nous nous verrons contraints de quitter le navire.
Au moment de pondre ce texte je n’avais pas encore reçu le communiqué de Bio Suisse contre l’application de la politique agricole PA 2011, mais cela ne fait que renforcer mon propos.
En juin 2007, les premiers à ne pas soutenir le référendum contre la PA 2011 ont été les organisations agricoles. L’USP, Bio Suisse, l’Alliance Agraire, le VKMB d’Herbert Karch, tous s’en sont donné à coeur joie pour tirer à boulets rouges sur le référendum contre la PA 2011.
Aujourd’hui, tous se mettent les uns après les autres à crier haut et fort que l’on ne les y reprendra plus.
Il y a eu d’abord les céréaliers qui sont montés à Berne en février avec plein de calicots contre cette politique agricole, puis les comités de nos organisations (vignerons, maraîchers, etc.) qui commencent à prendre conscience de toutes les chaussetrappes que recèle la PA 2011, et voilà maintenant que Bio suisse s’y met aussi. Mais, à propos, l’objectif de la PA 2011, c’est bien de préparer l’agriculture suisse à ce grand marché que nous promet l’OMC, et l’on ne peut pas dire que le Parlement et le Conseil Fédéral nous l’aient caché!
J’en viens à me demander tout simplement si nos organisations savent seulement ce qu’elles disent et si elles sont vraiment encore capables de faire une analyse. En l’espace de quelques mois Bio Suisse communique être pour le projet de libre-échange avec l’UE et aujourd’hui être contre l’application de la PA 2011… Personnellement, j’ai de la peine à comprendre. Comment être contre une politique qui nous prépare à affronter une politique que l’on trouve positive?
La situation de la planète nécessite une révolution, et nos organisations ne veulent faire que du bricolage dont je vous donne la recette: un peu de développement durable avec une pincée de commerce équitable et, pour terminer, avant de servir ajoutez-y une petite cuillère de libre-échange pour donner un peu de goût…
À bon entendeur!
Willy Cretegny, Président de Bio-Genève
Croyances et sentiments des chercheurs en manipulations génétiques (N° 6/08)
À propos de la journée «Dissémination du savoir et des plantes transgéniques» du 28 juin à la station de recherches ART Reckenholz
J’aimerais tout d’abord remercier les chercheurs, et bien sûr Urs Hans, d’avoir rendu cette rencontre possible. En tant que participant, j’ai savouré les émotions ambivalentes et me suis étonné de certaines affirmations des chercheurs, par exemple celle-ci: Bien que seuls 10 pour-cent des consommateurs veulent du bio, il est quand même autorisé.
Il était tout simplement délectable de voir avec quelle âpreté les chercheurs défendaient leur travail, soulignant à tout propos que la science détrône les croyances et que tout doit être vérifié. Il est donc compréhensible que le PNR 59 (programme national de recherche) étudie si une coexistence entre cultures OGM et fermes bio est possible bien que de nombreux faits démontrent, dans le monde entier, que les plantes contaminées par des transgènes sont devenues monnaie courante. Dommage que les scientifiques aient perdu la capacité de croire.
En y regardant de plus près, on constate tout de même que les scientifiques peuvent être très croyants. Ils prennent cependant la liberté de ne croire que ce qui leur plaît. Ils croient que leur projet vaincra la faim dans le monde. Ils croient que leur travail est légitime. Ils croient qu’ils n’ont pas besoin d’assumer la responsabilité de leurs faits et gestes parce qu’ils ont reçu de la politique le mandat de violenter les plantes de toutes les manières possibles et imaginables. Aucun sentiment, aucune joie ni affliction du chercheur n’influence ses résultats. Chaque ravageur est objectivé et analysé dans les têtes et les laboratoires. Mais si le ravageur se transforme en vandale, le chercheur a enfin le droit de laisser libre cours à ses sentiments... craintes et dé- ceptions submergent alors ces imperturbables cerveaux qui ne veulent pourtant que le bien de tous.
À mon avis, c’est justement sur ce point que la recherche devrait être renforcée: Comment les sentiments des chercheurs influencent-ils les plantes? Les chercheurs ne devraient-ils pas être reconnaissants que leur âme congelée se soit manifestée et se soit échauffée de colère pendant un moment? Peut-être un chercheur inventera-t-il un jour une balance capable de quantifier la peur et la déception en milli-, micro- et nanogrammes, puisqu’il est en dernier recours contraire aux principes scientifiques de prêter l’oreille à ses propres réflexions et celles de la population.
Donat Capaul, Paysan bio diplômé et sociopédagogue diplômé, Perrefitte BE
Le Bourgeon de l’avenir (N° 3/08)
À propos de l’article «Phase décisive dans l’élaboration du nouveau Concept directeur », bio actualités n° 2, mars 2008.
Je connais l’agriculture biologique depuis ma jeunesse, j’ai eu pendant des années un potager bio et je suis membre de la Produzenten- Konsumenten- Genossenschaft Bern (PKGB), la coopérative qui gère le magasin bio Hallerladen. En tant que physicien, je participe depuis 19 ans autravail de normalisation en Suisse, auprès du CEN (Comité européen de normalisation) et de l’ISO, et j’ai dirigé des groupes internationaux de normalisation. En tant que président du Comité de normalisation Énergie solaire de l’Association suisse de normalisation (SNV), l’organisation faîtière de la normalisation en Suisse, je suis sans cesse confronté aux difficultés que rencontrent les labels et la certification des produits. Voici les réflexions que la lecture de l’article précité m’a inspirées. Ne jouez pas avec la crédibilité du Bourgeon! Ce que vos prédécesseurs ont mis des années à développer à force d’efforts et de rigueur ne doit pas être galvaudé sur le marché. Le Bourgeon doit rester un label crédible qui mérite la confiance de l’acheteur. Cela nécessite:
- a) des normes claires qui règlent de manière absolument claire les conditions à remplir pour l’octroi du Bourgeon, et cela de la production à la vente au détail (toute la filière de production et de distribution!);
- b) des contrôles stricts, réguliers et systématiques du respect de ces normes effectués par des mandataires accrédités;
- c) des sanctions en cas de violation des règles définies.
S’il manque ne serait-ce qu’un seul des trois termes de cet ensemble d’exigences, la crédibilité chute – du moins en partie. Gardez en main la définition de vos normes! N’abandonnez pas la maîtrise de la définition des normes pour l’octroi du Bourgeon! Les intérêts financiers sont si grands qu’ils pourraient provoquer un affaiblissement des normes simplement pour permettre à un plus large cercle de producteurs ou de distributeurs de vendre leurs produits plus cher grâce au «prétexte Bourgeon». Suivez la «New Approach» (NdT: nouvelle approche) pour la normalisation (NdT: au sens de définition des normes). La «New Approach» est la stratégie utilisée par l’UE depuis les années 90 pour sa législation. Sa stratégie précédente consistait à lui faire régler elle-même chaque détail pour l’inclure dans ses directives. Cette démarche l’empêchait cependant d’avancer car la politique ne permet pas de régler tous les détails de fonctionnement du marché. Cela va déjà beaucoup mieux depuis que l’UE suit la «New Approach». En quoi consiste cette stratégie? Dans la «New Approach», l’État et l’économie ont chacun un rôle à jouer. L’État – ou les États de l’UE – définit des principes: ce sont les directives du Conseil des ministres de l’UE. C’est ensuite l’économie, représentée par le CEN, qui reçoit le mandat d’appliquer les directives en définissant des normes qui doivent correspondre à l’état de la technique et qui doivent être élaborées par les firmes et les autres acteurs du marché. Cette manière de faire permet d’obtenir des «normes harmonisées» qui sont bien acceptées par de larges cercles et qui définissent les règles du jeu qui régissent le marché. Vu que l’économie a élaboré ces normes ellemême, ces documents sont exactement ce dont elle a besoin: ils ne réglementent ni trop ni trop peu.
Transposé aux conditions suisses, voilà ce que cela signifie pour l’agriculture biologique:
- la Confédération doit continuer de définir les conditions cadres (ce qui correspond aux directives de l’UE), c.-à-d. fixer les principes;
- votre organisation, Bio Suisse, doit définir les normes qui sont nécessaires pour l’application des principes fédéraux.
Il y a, vu d’une manière générale, un autre élément qui doit aussi être pris en compte: l’État est l’autorité de surveillance pour la certification des produits. Seuls les organismes accrédités par l’État peuvent effectuer la certification des produits, c.-à-d. attester la conformité des produits aux normes existantes si cela est explicitement exigé par lesdites normes. Dans les cas les plus simples, les fabricants déclarent eux-mêmes cette conformité, mais, partout où la santé et la protection des personnes sont en jeu, seuls des organismes accrédités peuvent s’occuper de la certification.
Dans le cas de l’agriculture biologique, je recommanderais de réfléchir soigneusement au statut des organismes de certification pour leur octroyer le plus possible d’«officialité» et d’«impartialité». C’est presque l’élément le plus important pour la crédibilité du Bourgeon. En résumé: votre variante 3 me semble être la meilleure – à condition que les structures adéquates puissent être clairement définies. Vous devriez en outre réfléchir très soigneusement à la manière d’utiliser la normalisation et la certification en agriculture biologique. Je recommande de recourir à la «New Approach», car elle ne peut que favoriser l’image de l’agriculture biologique en tant que «branche normale de l’économie».
En effet, pourquoi votre branche devrait-elle suivre une voie différente si ce processus de normalisation et de certification a fait ses preuves partout ailleurs? Par ailleurs, si vous le faites dans le cadre de la SNV, vous aurez automatiquement accès à la normalisation européenne dans ce domaine. Et si vous assumez de cette manière en Suisse un rôle de précurseur, vous pourrez «vendre» votre solution à l’Europe dans le cadre du CEN! Les pays partenaires sont en effet toujours heureux de reprendre clés en mains des solutions prêtes à l’emploi si elles ont fait leurs preuves. Et ce serait pour vous une bonne chose de pouvoir faire passer vos idées, non?
Jean-Marc Suter, Berne
Renforcer l’aspect global du bio (N° 3/08)
Bio Grischun se préoccupe beaucoup du futur Concept directeur de Bio Suisse. Entre autres parce que le Bio sera bientôt pour les Grisons ce que le Sechseläuten est pour Zurich et le Carnaval pour Bâle. En 2007, 56 % des fermes ayant droit aux paiements directs travaillaient déjà selon les directives bio. Et 1291 fermes bio sur les 1433 que comptent les Grisons font partie de Bio Suisse.
Si 142 fermes bio (10 %) travaillent maintenant selon les directives de l’ordonnance fédérale sur l’agriculture biologique, elles n’étaient que 118 en 2006. Nous constatons donc à regret que le Bourgeon perd lentement mais sûrement de son importance. Et Bio Grischun sait aussi très bien que les fermes Bio Fédéral pensent sérieusement à se regrouper en organisation.
Bio Grischun ne s’inquiète d’ailleurs pas seulement de l’amenuisement de l’importance du Bourgeon, mais aussi de la diminution de son influence en politique et sur le marché.
Politique: Les décisions réellement décisives dans le domaine de la réglementation de l’agriculture biologique sont depuis longtemps prises par l’UE ou la Confédération. Les temps où Bio Suisse pouvait déterminer seule ce qu’est le bio sont révolus. L’actuelle structure organisationnelle de Bio Suisse lui permet encore tout juste de prolonger les délais d’application des modifications des directives ou de définir des directives plus strictes que celles de l’Ordonnance bio. Notre influence est actuellement trop faible là où se prennent les décisions (États membres de l’UE, Bruxelles). Bio Grischun est persuadée qu’il faut que ça change.
Marché: L’importance commerciale du Bourgeon décline progressivement. Quelques exemples:
- Coop: La porte est ouverte – entrouverte, mais ouverte quand même – aux produits bio non Bourgeon. Et le label Naturaplan est devenu un label bio à part entière.
- Migros: A son propre label bio et des normes plus basses pour les produits importés. Il y a le risque que Migros commercialise aussi des produits Bio Fédéral.
- Manor: A son propre label bio, le Bourgeon n’est pas utilisé mais le label IP Suisse est très présent.
- Globus: Vend des produits bio étiquetés «Bio UE», le Bourgeon étant plus la cerise que le gâteau.
- Spar: Vend très bien les produits des fermes Bio Fédéral (p. ex. ceux de la laiterie Puracenter de Lenzerheide GR).
- Produits laitiers Natürli des montagnes zurichoises: Commercialisation réussie de produits bio sans le Bourgeon.
- Magasins bio: Misent fortement sur leur marque «Echt Bio» et relèguent de plus en plus le Bourgeon à l’arrièreplan.
- Restauration: En 27 ans, le Bourgeon n’a pas réussi à y prendre pied sérieusement.
- Denner, Aldi, Lidl: Le bio y est ou y sera, mais probablement sans le Bourgeon.
Bio Suisse a été créée pour fédérer les forces bio. Ce regroupement qui a fait la grandeur et la force de Bio Suisse menace maintenant de se dissoudre. Bio Grischun est clairement d’avis que cela nuirait à l’ensemble du mouvement bio. Nous pensons que c’est la variante 3 – séparation de la Fédération et de la Marque – qui, une fois soigneusement mise au point, permettra le mieux d’éviter ce scénario indésirable. Cette variante devrait en fait s’appeler «Regroupement et renforcement du mouvement bio», car la variante 3 associe les avantages de la variante 1, c.-à-d. le regroupement des forces bio, et ceux de la variante 2, c.-à-d. le positionnement optimal du Bourgeon sur le marché.
Alfons Cotti, Sur GR, Président de Bio Grischun
Forts et fiers «rebelles bio» (N° 3/08)
«Rebelles bio», disait la légende d’une photo de Daniel Wismer (3 fois champion avec ses yacks et chauffard roulant à contresens) et moi dans le 161ème bulletin de Bergheimat. Et cela seulement parce que nous nous sommes permis de déposer une motion demandant que Bergheimat sorte de Bio Suisse. – Oui, je me sens quelque part honoré et fier de recevoir un tel titre. Sepp Holzer (NdT: un grand promoteur de la permaculture) ne s’est-il pas lui-même estampillé «Agrar-Rebell»?
J’aimerais tout d’abord préciser que je n’ai absolument rien contre le bio des origines! Mes idées sur le bio, l’environnement, le climat etc. n’étaient déjà pas passées inaperçues entre 1972 et 1974, quand j’étais élève agriculteur au Plantahof à Landquart. J’en ai aussi parlé avec des maîtres d’alpages et je suis paysan de montagne indépendant depuis 1981 – avec ma femme et trois enfants qui s’intéressent aussi au bio. Je suis toujours resté fidèle à ma conviction qu’il faut se préoccuper de la Terre Mère parce que c’est elle qui nous nourrit!
Si rebelle bio désigne un lutteur qui se défend contre tout ce qui est «cahierdeschargisé» au nom de Bio Suisse et endépit tout bon sens, alors oui, j’en suis un. Je me demande par exemple pourquoi le Bourgeon accepte le foin Bio UE et pas le foin Bio CH. Je me demande d’autre part aussi pourquoi une pierre à lécher acceptée par le Bourgeon n’est soudainement plus autorisée parce que le vendeur refuse de payer à Bio Suisse des droits de licence toujours plus élevés.
Je me demande encore pourquoi les délégués acceptent démocratiquement une augmentation des cotisations au lieu d’exiger une rétribution au mérite pour le secrétariat de Bio Suisse. Je me demande aussi pourquoi la maison-mère du mouvement bio, le Möschberg à Grosshöchstetten, n’emploie plus le Bourgeon ... Et si les deux antennes de téléphonie mobile qui se trouvent à Bâle sur le toit des bureaux de Bio Suisse n’arrivent pas à capter les signaux des «chauffards qui roulent à contresens» (les fermes Bourgeon qui quittent Bio Suisse), alors oui, je me demande s’il n’est pas naïf de ne croire aveuglément qu’en la bonté de Bio Suisse!
Comment peut-on à la fois promouvoir la souveraineté alimentaire et rêver du libre-échange comme chance d’exportation pour les produits Bourgeon? Qui c’est qui nourrit en fin de compte les consommateurs bio? Où est la logique? Déjà maintenant, 80 % des produits bio vendus en Suisse viennent de l’étranger! Se contentera-t-on d’attendre les bras croisés de passer à 95 %? Et qu’en sera-t-il du CO2 et de l’énergie grise?
Le 23 avril 2008, on votera à Olten sur le nouveau Concept directeur de Bio Suisse, et le label Bourgeon est en passe de se muer en marquer de voiture, en marque de vie morte et mutilée (lait UHT produit par des vaches écornées!). Les directives sont édictées par la Confédération et l’UE. Et la Coop, sur laquelle Bio Suisse a tout misé, sait très bien comment s’en tirer toute seule.
Il est irresponsable de ne donner aucune chance au bio des origines! Voilà donc ce pour quoi je lutte: redonner à l’humanité un mode de vie naturel en harmonie avec la Terre Mère – qui est en fin de compte la seule à pouvoir nous nourrir.
Et c’est donc dans ce sens que je me considère comme un rebelle bio: sincère, fort et fier!
Armin Capaul, Perrefitte BE
Dernière mise à jour de cette page: 10.04.2024