Michaël Farny, en charge de la viticulture et de l'oenologie au FiBL Suisse romande, a accueilli les participantes et participants ainsi que les intervenants à l'amphithéâtre de la Haute Ecole de Sion pour cette première édition organisée dans le canton du Valais. Cet accueil s'est poursuivi par un discours d'introduction des hôtes d'honneur: l'Office de la vigne et du vin du Valais, la HES et Bio Valais.
La recherche et la pratique au service de la viticulture biologique
L'entrée en matière de la journée a démarré avec la présentation par Michaël Farny des projets actuels du FiBL en Suisse romande ainsi que ceux de Suisse alémanique par Beatrice Steinemann. David Marchand, conseiller viticole au FiBL, a ensuite fait un retour sur la saison 2024 marquée par une pression de mildiou inédite et étant de fait très éprouvante pour les vigneronnes et vignerons. Le Valais, berceau de la viticulture suisse, a accueilli plusieurs projets, dont des expérimentations sur les couverts végétaux. Ces essais menés depuis 2021 visaient à évaluer une technique de protection contre le gel par les engrais verts et à faciliter l'entretien des parcelles en terrasses non mécanisables, précise David Marchand. Les vignobles en terrasses peuvent aussi être cultivés en bio, c'est ce que nous prouve le retour d'expérience du domaine du Mont d'Or VS et du Domaine Verzier (Vallée du Rhône, France). Bruno Luyet et Maxime Verzier ont respectivement représenté ces deux domaines pour répondre avec sincérité aux questions de Michaël Farny et de l'assemblée sur les problématiques qu'ils ont rencontré ainsi que sur les solutions qu'ils ont mis en place pour permettre la conduite en bio de leur vignoble en terrasse.
Le marché du vin doit s'adapter aux consommateurs
Alexandre Mondoux a mené à Changins VD une étude sur les opportunités de marché de la consommation de vin en Suisse. Nous le savons, celle-ci est en baisse et surtout évolue. Alors que les vins tranquilles (non gazeux) de suisse ou d'importation ont de moins en moins la côte, les vins mousseux sont très prisés, surtout en suisse allemande. Par ailleurs, ce sont surtout des vins italiens que les Suisses consomment en terrasse à l'arrivée des beaux jours ou encore pendant les périodes de fête. Il s'agit donc d'établir une offre solide de vins mousseux abordable en Suisse car selon cette même étude, les gens sont prêts à les payer plus cher que ceux importés. Angela Deppeler, cheffe de produits pour les vins, herbes aromatiques et plantes ornementales chez Bio Suisse corrobore ces observations car les ventes des vins mousseux et vins rouges Bourgeon ont augmenté en 2024. Selon elle, les jeunes font attention aux labels et à la qualité de ce qu'ils et elles consomment.
Le vin sans ou avec peu d'alcool (NoLo) était à la bouche et aux lèvres – pendant la dégustation thématique à midi – de tous les participant-es de ce congrès. Alexandre Mondoux démontre d'ailleurs que les boissons peu alcoolisées à base de vins mousseux sont très appréciées, encore une fois, du côté suisse alémanique. Le marché de ce type de vins semble exploser et surtout les grandes maisons misent dessus pour ouvrir le marché à une nouvelles clientèle. Cependant, la technologie est plus rapide que le cadre légal dont les labels sont dépendants. Bio Suisse et Demeter ne peuvent pour l'instant pas prendre de décision quant aux méthodes de désalcoolisations. Benoît Bach, collaborateur de Changins rappelle que les vins NoLo doivent être réfléchis comme tels dès la plantation des cépages. De façon plus général, il met en garde sur les différents défis que représentent de telles boissons notamment hygiéniques (l'alcool freine la prolifération de pathogènes en bouteille) et la perte d'arôme dans les vins rouge. Les vins désalcoolisés bio ont pour l'instant qu'une petite part de marché. Il y a aussi des boissons innovantes à base de vins qui ont un grand potentiel de marché, nous explique Vincent Beetschen, du Domaine éponyme. Sa boisson: le Diolipop met en avant une nouvelle façon de valoriser le cépage Diolinoir, originaire du Valais. Cette boisson originale, à faible teneur en alcool, a suscité l'intérêt d'un bon nombre de participants lors de la séance de dégustation.
Selon Angela Deppeler, le vin nature est en vogue et plaît, surtout dans les zones citadines. Par ailleurs, le danger de green washing est important car un vin nature ne porte pas forcément de labels. Frank Siffert, représentant de l'Association suisse vin nature partage que les vins natures sont en constante évolution pour permettre de s'adapter aux attentes des consommateurs. Selon lui, les vins issus de ces vinifications «douces» permettent d'étendre la gamme des domaines ce qui constitue une véritable force sur les marchés.
Le matériel végétal s'adapte aussi
Alexandre Mondoux et Angela Deppeler sont d'accord pour dire que les cépages résistants (PIWI) – qu'ils soient vinifiés purs ou en assemblage – ne sont pas assez promus aux consommateurs. Le défi est de taille puisque les PIWI vont être de plus en plus planté pour faire face au changement climatique. Les AOC doivent aussi évoluer. C'est ce dont témoigne Maxence Klingenstein du Conseil Interprofessionnel des vins d'Alsace. Les instancesdu vin en Alsace sont en train de faire entrer des cépages résistants au sein de l'AOC qui a d'abord été retissant à cette évolution. Par ailleurs, le choix du porte-greffe par rapport à son environnement est également très important nous rappelle Jean-Sébastien Reynard, collaborateur d'Agroscope. Il témoigne du fait que la sélection de la vigne est un domaine qui évolue volontiers même si l'inauguration d'un nouveau cépage ou porte-greffe prend beaucoup de temps. Jean-Sébastien Reynard insiste sur le fait que les PIWI doivent être traités régulièrement pour allonger leur efficacité dans le temps, à l'échelle individuelle mais aussi globale.
Emma Homère, magazine Bioactualités
Pour en savoir plus
Observation du marché (OFAG)
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